Chapitre IV :

Essais de retrouver sa place

Dans les chapitres précédents, nous avons étudié longuement l’identité du Frère (ou image d’un Frère lasallien) en se basant sur la Règle et sur les enseignements des Supérieurs ainsi que les champs de travail possibles qui s’entrouvrent répondant à sa vocation qu’est l’ « éducation des jeunes et des pauvres comme priorité ». Est-ce qu’il faudrait rester là à attendre un “moment propice” pour pouvoir retrouver sa place dans cette société socialiste ? C’est bien la question centrale de cette thèse. Évidemment, dans cette situation, on ne peut pas faire comme l’on veut. Le Frère John Johnston a affirmé : « nous devons commencer par nous-mêmes. Ne jouons pas aux victimes. Ne condamnons pas les autres, ni simplement ne “maudissons pas la nuit” pour les problèmes auxquels nous avons à faire face. Nous devons prendre la responsabilité de nos vies. Nous devons être disposés à prendre nos vies à l’envers, si nécessaire, pour recommencer à zéro »[1]. Cependant comme nous avons vu, la réussite du passé a gravé dans l’esprit des gens, et même dans celui des Frères, une fausse image d’un Frère-éducateur, qui n’est pas facile d’extirper , même dans le cas où « l’Institut, comme tel ne “fait” rien. C’est “nous qui agissons” […] : nous, Frères individuels ; nous membres de nos communautés ; nous membres des Districts »[2]. En même temps, il a suggéré maints projets pour ceux qui osent créer, dans la Lettre Pastorale de 1999. Citons entre autres :[3]

« Nous pouvons :

« - faire de la défense des enfants et de leurs droits, un thème majeur du 43e Chapitre général,

« - organiser au niveau des Régions ou des Districts des rassemblements de Frères intéressé par des sessions de discussions et de “brainstorming”.

« - déclarer, par écrit, être engagés dans la défense des enfants comme étant dimension intégrante de la mission du District,

« - exécuter la recommandation du Chapitre général d’évaluer l’efficacité de nos programmes et de notre action pour la “promo­tion de la justice, en particulier en ce qui concer­ne l’alphabétisation, les droits des enfants, les valeurs d’éducation et les accompagnements spécifiques”,

«- fournir du matériel pour une for­mation continue des enseignants, du personnel, des parents, des membres du bureau et des an­ciens élèves, à la doctrine sociale de I’Église et aux orientations de l’Institut,

«- organiser des colloques, des séminaires, des conférences, des discussions, des ateliers pour des membres de la famille lasallienne,

«- développer des fonds pour des bourses afin d’assurer une aide totale ou partielle à autant de jeunes dans le besoin qu’il est possible,

«- créer des programmes éducatifs pour former tous nos jeunes à prendre con­science des conséquences de la pauvreté et des structures sociales inadéquates,

«- aider (nos élèves) à développer une conscience sociale et à accepter leur responsabilité du changement,

«- organiser des conférences, des séminaires sur le thème des enfants exploités,

«- participer aux systèmes politiques en tant qu’avocat des enfants. Par des doctorats honoraires ou autres récompenses,

«- faire connaître des personnes qui consacrent leur vie à la promotion des droits humains des enfants,

«- dans notre programme de formation des enseignants, assurer que les futurs enseignants connaissent bien la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, la Convention sur les Droits de l’Enfant et leurs implications pour les enseignants et les éducateurs.

«- promouvoir la notion de “chaque école = un centre d’impact”.

«- développer la création de “programmes de servi­ce” dans le voisinage, la ville ou la cité.

«- pousser les parents, les anciens élèves et les élèves eux-mêmes à participer à des pro­grammes de service des enfants nécessiteux,

«- encourager les Lasalliens, Frères, partenaires, parents, anciens élèves, membres des bureaux, élèves, à devenir activement impliqués dans des organisations interna­tionales, nationales, civiques, catholiques et œcuméniques vouées à lutter de façon politique contre les structures injustes et la protection légale inadéquate des jeunes,

«- promouvoir vigoureusement le développement des jeunes Lasalliens et des Volontaires lasalliens pour des projets à long terme ou à court terme, les invitant à se consacrer d’une façon particulière aux enfants et aux jeunes abandonnés ou marginalisés,

«- nous efforcer de mettre en pra­tique les articles 40a et 19a qui demandent aux Districts de développer un plan pour faire du “service direct des pauvres”, progressivement, “leur priorité effective”, tant localement qu’à l’étranger,

«- soutenir les propositions “de confier à d’autres certaines de nos oeuvres pour satisfaire des demandes urgentes”.

«- En outre, nous offrir nous-mêmes pour un service “là où les besoins se font davantage sentir.” (Règle, 40a, 19a),

«- renforcer les efforts actuels et créer de nouvelles communautés et des “projets d’insertion” dans des secteurs pauvres (Circ 415 pp 25,55). “Bien des communautés vivent et travaillent au mi­lieu des pauvres et des marginaux, elles adoptent leurs conditions de vie et partagent leurs souffrances, leurs problèmes et leurs dangers.”

«- explorer la possibilité d’Écoles itinérantes tel le réseau de classes mobiles en France,

«- renforcer des programmes existants et établir de nouveaux centres pour les enfants de la rue, les orphelins, les enfants abandonnés,

«- maintenir notre longue tradition lasallienne de travailler avec des enfants qui ont des problèmes de comportement en leur assurant une assistance spécialisée dans nos écoles ou en renforçant ou en créant des centres spécialement conçus à cette fin,

«- assurer des facilités et des soins dans nos écoles pour des enfants qui ont des handicaps physiques ou mentaux, mais peuvent fonctionner dans un environnement scolaire normal,

«- travailler directement ou indirectement avec des enfants qui ont des handicaps sérieux, en particulier lorsqu’ils sont abandonnés ou délaissés,

«- améliorer la qualité de notre formation professionnelle et nous efforcer d’impliquer nos communautés éducatives dans notre travail…»

***

Relater longuement les recommandations ci-dessus du Frère Supérieur donne au lecteur sans doute le « vertige ». Mais, il faut reconnaître sincèrement et humblement que c’est essentiel pour favoriser la conviction des Frères, des collaborateurs et aussi des lecteurs de ce document. Sans me baser sur ces écrits pour agir, je serais seul à « nager à contre-courant ». Les appels du Frère Supérieur à choisir les « pauvres comme priorité », « comme un thème majeur » dans les Chapitres des Districts... ne sont pas nouveaux, mais déjà datés de 1994 et plus. Douze ans après la publication de cette Lettre et d’autres documents concernant l’identité lasallienne, avec beaucoup d’effort pour « convertir » la mentalité des « membres de la Famille Lasallienne » au Vietnam, il en reste encore un grand nombre qui n’y croient pas complètement, en considérant comme « replâtré »[4] ce qui est réalisé.

Cependant, à ces questions sur les options possibles pour vivre la vocation lasallienne dans cette situation concrète, bien que les réponses soient multiples et variées,  le choix des pauvres reste quand même prioritaire.

Quels sont les gens qui ont le plus besoin des Frères ? (on peut donner plusieurs choix en même temps=285 réponses)

-     des étudiants :                                                                                    55

-     des élèves :                                                                                         62

-     des gens du quartier pauvre :                                        76

-     des enseignants :                                                                               20

-     des parents d’élèves :                                                                       72

Dans quels domaines les Frères pourraient-ils s’intégrer dans la situation actuelle ? (on peut donner plusieurs choix en même temps=240 réponses)

-     écoles d’enseignement général :                                                    11

-     centres de formation professionnelle :                                            21

-     centres pour les personnes abandonnées 
(toxicomanes, enfants de la rue, ….):                             46

-     enseignement dans les écoles publiques :                                   14

-     activités sociales :                                                                              38

-     collaboration avec la paroisse :                                                       29

-     ouverture des sessions de formation :                                            13

-     tous les domaines cités :                                                                  68

Quels sont les domaines les plus urgents ?

-     Ouvrir des écoles d’enseignement général :                                   9

-     Des centres de formation professionnelle :                                   11

-     Des centres pour des personnes abandonnées 
(toxicomanes, enfants des rues, handicapés…) :           64

-     Enseignement dans les écoles publiques :                                     7

-     Activités sociales :                                                                             16

-     Collaboration avec la paroisse :                                                      14

-     Ouvrir des sessions de formation :                                                  12

Nous distinguons au Viêtnam et à l’intérieur du District deux catégories du service des pauvres :

a) « activités saisonnières » :

Depuis plusieurs années, les Frères s’invitent et sont invités à animer des groupes de jeunes, à organiser des sorties pour les orphelins, enfants de la rue... pendant certaines fêtes de l’année telles que : mi-automne (fête des enfants), Noël, Têt, 1er juin (fête internationale des enfants)... Ou bien on vient au secours des victimes d’inondations, de tempêtes, pour distribuer une dizaine de kilos de riz ou 3 ou 4 dollars américains à chaque famille ou encore pour consulter et distribuer gratuitement des médicaments aux malades..... J’appelle toutes ces activités humanitaires « activités saisonnières » (photo, p. 445).

b) « activités permanentes » : Des projets à long terme comme ceux qui figurent dans la liste aux annexes [5].

Pourquoi cette distinction ? Les « activités saisonnières » sont d’abord cycliques. Après coup, on ne souvient plus de la vie ou de la mort de celui ou plutôt de ceux qui ont bénéficié de notre « compassion ». Je ne dis pas cela avec l’intention de les supprimer ou banaliser la bonne volonté des personnes charitables ou encore les critiquer (photo, p. 446). Bien sûr que non. Les pauvres ont besoin de ces bonnes âmes pour les soulager et les aider à sortir de l’état misérable sans pouvoir éviter cependant des incidents négatifs dans l’organisation. Je suis persuadé que, parmi les Frères, il n’y a personne qui ait organisé et participé à ces activités plus que moi depuis mon retour de France en 1999 et je continue encore jusqu’à ce jour : des consultations et distributions des médicaments pour les pauvres dans des provinces une fois tous les mois ; des visites et offres des cadeaux aux malades isolés dans les hôpitaux, aux hospices, aux orphelinats, aux familles des minorités ethniques... Mais, en allant rencontrer ces pauvres par la voie des activités humanitaires, je sens toujours quelque chose qui ne me satisfait pas. Ce n’est pas suffisant pour la vie des Frères. Elle ne peut pas s’arrêter là. C’est à partir de cette réflexion que je cherche sans fatigue, langage un peu vaniteux, tous les moyens pour établir quelque chose (et ce n’est pas n’importe quelle fondation) qui soit stable répondant à ma vocation d’éducateur (photo, p. 447).

1er essai : classe de formation professionnelle

Le processus de l’établissement du centre de formation professionnelle de Duc Minh se divise en trois étapes distinctes : première étape de 1989 à 1992, deuxième étape, de 1992 à 2004 et troisième étape, de 2004 jusqu’à ce jour. La première étape et la seconde ont déjà été abordées au chapitre quatre de la deuxième partie. Je continue ici la troisième (photo, p. 449).

Troisième étape :

Le centre de formation professionnelle a fonctionné sans aucun incident jusqu’à l’an 2003. Ce centre avait été officiellement ouvert comme un satellite du Centre de Formation du 3e District (centre du gouvernement) depuis 1992. Vers le mois d’octobre 2003, le directeur m’a invité à son bureau et annoncé qu’« après plus d’une dizaine d’année de fonctionnement, mon centre possède toutes les possibilités pour demander l’autorisation d’ouvrir un centre privé ». Je lui ai demandé la raison. Après une longue réflexion et sur mon insistance, il m’a répondu de côté : « la chose est insignifiante. Mais il ne faut pas laisser les autres se baser sur cela pour chercher des histoires ». Il m’a promis enfin de faire tout son possible pour m’aider à obtenir l’autorisation d’ouvrir un centre de formation professionnelle privé pour son développement. Et il a tenu parole en me donnant un papier d’évaluation et de présentation très favorable. Plus tard, j’ai compris ce qu’à ce moment-là je n’avais perçu que vaguement : il existe une querelle de pouvoir à l’intérieur du comité directeur se divisant en deux parties. L’autre a fait des commentaires au sujet de la présence de mon centre comme satellite et conclu que c’est grâce à sa « protection ». Au fond c’est parce que c’est une communauté religieuse. Depuis ce jour-là, je n’ai plus le droit de recruter de nouveaux stagiaires. En réalité, les classes ne furent pas tout à fait arrêtées. Mais nous devions annoncer à l’avance aux nouveaux arrivés qu’ils n’obtiendraient pas le certificat à la fin de la session.

Je commence à me renseigner sur des personnes expérimentées et surtout à trouver un « personnage puissant » pour m’aider. Un de mes amis m’a présenté une dame disant qu’elle est dans l’intimité d’une autre qui travaille au Service des Invalides et du Travail, office qui examine les dossiers de ce genre. Je suis d’accord pour faire la démarche et elle m’a assuré son aide sans aucune condition. Cependant, six mois après, le dossier n’a fait aucun progrès. Anxieux, j’ai cherché un autre tuyau. Un jour, un certain monsieur en bonne tenue est venu me voir de la part d’une personne que je connais en disant qu’il travaille dans une compagnie de construction et qu’il sait ce qu’il faut faire pour répondre à mon souhait. Cependant, étant membre d’une compagnie de construction, il lui faut une raison pour justifier son intervention. Plus clairement, il veut obtenir un travail de construction dans la communauté. Je lui ai donné mon consentement : ajouter un étage au nouveau bâtiment. Le contrat fut alors signé, se composant de deux parties différentes : frais pour l’autorisation d’ouvrir un centre de formation professionnelle privé et coût de la construction. Le prix restait à négocier. La limite fut enfin fixée : 6 000 USD pour le papier et 12 000 USD pour la construction. Ce prix était inaccessible à une communauté sans ressources financières. J’ai eu donc recours à mes Frères vietnamiens à l’étranger. Dans ce cas, il n’y a que les vietnamiens qui peuvent comprendre à fond le problème et juger sa nécessité urgente.

La démarche commença et il me promit le résultat en 3 mois. Un mois après, il me pressa de lui payer une partie pour qu’il puisse commencer la construction préparant ainsi l’inauguration du centre. Quand le plancher fut fini, il m’a demandé de tout lui payer pour qu’il achète les matériaux et m’a menacé d’arrêter la construction si je n’étais pas d’accord. Mais après avoir reçu l’argent, il a disparu complètement, je ne l’ai jamais revu jusqu’à ce jour. Pourtant, son entrepreneur continue toujours et a terminé la maison tandis que le papier, grâce à celui qui m’a présenté cet intermédiaire, pour garder sa réputation, a atteint son but et nous avons obtenu l’autorisation de fonder le centre signé le 12 avril 2005, après une année et demi d’interruption et de démarches. Désormais, le centre de formation professionnelle privé de DUC MINH a le droit de délivrer le certificat après l’apprentissage. C’est un événement important et encourageant pour les Frères, pour les anciens élèves et pour des personnes qui connaissent les Frères, parce que DUC MINH est devenu aujourd’hui le premier centre d’éducation des Frères officiellement reconnu par les autorités après 29 ans d’absence.

L’histoire nous révèle que cet événement n’est qu’un retour à la source comme a décrit l’historien Frère Alban : « Comme l’enseignement des pauvres était l’œuvre de prédilection de Saint Jean-Baptiste de La Salle, une école gratuite fut ouverte dans les locaux de l’Institution Taberd. [...].

« Pour finir, signalons qu’une école de sourds-muets avait été établie quelque temps avant l’arrivée des Frères. Aussi, les Missionnaires s’empressèrent-ils de la confier aux Lasalliens qui la transfèrent à Tân Dinh en lui adjoignant un établissement professionnel. Le tout prit le nom d’École Saint-Michel »[6].

Et plus loin dans son ouvrage, Frère Alban a donné un peu plus de détails de cette première classe d’apprentissage pour les pauvres : « À deux kilomètres de Giadinh, avec ses paillotes formées de bambous fichés en terre et recouverts de feuilles de latanier - nous sommes en 1900 - parmi toute une floraison de cocotiers et d’aréquiers, voici l’École lasallienne des Sourds-Muets. [...]. Actifs et intelligents, les petits sourds-muets sont initiés à la menuiserie, à l’ébénisterie, à ameublement, à la sculpture vietnamienne et française sur bois, à la cordonnerie. Gaiement on travaille et on vit. Une faible proportion de ces enfants sont catholiques, mais à tous on enseigne au moyen d’images, la morale chrétienne »[7].

Ainsi, avant l’école Saint Louis de Gonzague qui a été changé en La San Duc Minh, au début du siècle précédent, les Frères étaient déjà présents à Tân Dinh dans une école d’apprentissage pour les sourds-muets portant le nom « École Saint-Michel ».

Le Centre de formation professionnelle privé de DUC MINH aujourd’hui suit la trace de son prédécesseur en recevant des jeunes financièrement en difficulté, des enfants de la rue sans distinction de religion et de classes sociales pour les pourvoir d’un métier, en espérant qu’il les aide à trouver une place, leur place, dans la vie (photo, p. 450).

Pendant l’histoire de son fonctionnement qui a duré 17 ans, le Centre d‘apprentissage de DUC MINH a dû s’escrimer pour vaincre des obstacles venus de tous côtés, de l’extérieur ainsi que de l’intérieur pour tenir debout. Aux jours du fonctionnement de la première classe en 1989, par exemple, un grand personnage du District a donné son opinion en ricanant, avec un regard aux yeux à demi ouverts : « c’est comme ça, ce qu’on appelle “nouvelle école” ? ». Ce personnage reste encore vivant et a pourtant participé aussi aux cérémonies de l’inauguration du Centre en juillet 2005.

En regardant vers le passé, des moments difficiles apparaissent en tout temps tout au long de ce trajet de 17 ans. Mais à part cela, des joies y sont parsemées et DUC MINH se sent content et ravi de ce qu’il a pu apporter à la société des pauvres :

-          consultation et distribution des médicaments aux pauvres dans les provinces lointaines du centre au sud environ une fois tous les mois ; offre des chariots roulants pour les handicapés... Le nombre des malades qui ont bénéficié de cette œuvre s’élève à 6 022 personnes du début de 2004 à la fin de 2005.

-          Ouverture des classes d’affection (classes gratuites) pour les enfants de la rue du 7e arrondissement depuis l’an 2000.

-          Réception des jeunes en difficulté financière au centre DUC MINH même pour l’apprentissage ; ouverture aussi des classes d’apprentissage pour les enfants de la rue du 7e arrondissement et de celui de Tân Binh.

Le centre DUC MINH s’efforce depuis sa fondation de :

1- créer un milieu de jour en jour renouvelé pour répondre aux besoins des jeunes et de la situation sociale en fonction du développement du monde ;

2- créer un milieu où la qualité de la formation occupe toujours une place prioritaire, conforme au niveau de tous les stagiaires ;

3- créer un milieu de formation visant le but de pourvoir les étudiants d’une bonne qualité de formation et de l’acquisition d’une conscience professionnelle ;

4- créer un milieu sans distinction de classe sociale que les pauvres puissent fréquenter ;

5- créer un milieu « ouvert », prêt à recevoir les jeunes et adultes en difficulté pour faciliter leur réinsertion sociale.

2e essai : Classe d’affection

Je suis revenu au Viêt-Nam en 1999. Pendant cette année s’est déroulé le Chapitre 9 du District. L’une des Propositions sur la mission des Frères a pris une position décisive d’aller vers les pauvres : « Pour signaler la Sainte année 2000 », le District : « Crée une œuvre pour les enfants en difficulté ». En réalité, cette Proposition est née et semble catégorique parce que le Père Jean, un prêtre allemand, a proposé aux Frères l’administration d’un centre pour les enfants de la rue déjà existant, dans les locaux de la paroisse de Câu Kho. Le Frère Gustave Duc et un autre Frère ont été officiellement nommés pour cette activité. À mon retour au mois d’août 1999, il m’a mis au courant de l’échec de ce projet parce que le Père a confié l’administration de ce centre aux autorités locales.

Les derniers jours de l’an 1999 sont comptés, l’an 2000 vient et la réalisation de cette Proposition semble être passée sous silence comme plusieurs autres projets ou Propositions, soit parce qu’on n’a pas un esprit assez créatif, soit parce que la situation sociale ne le permet pas, ou soit encore parce que le feu du zèle manque. Comme je n’ai pas eu assez de préoccupations pendant cette année-là, et surtout qu’il est connu que j’ai présenté un mémoire de maîtrise en France sur le « problème des enfants de la rue à Ho Chi Minh-Ville », je me suis senti obligé d’y mettre ma main (photo, p. 451).

Le quartier choisi est celui de Tân Hung du 7e arrondissement de Ho Chi Minh-Ville que je connais un peu sa situation sociale et économique. Le 7e arrondissement est situé de l’autre côté du canal Kinh Te, juxtaposé au 4e arrondissement, pas très loin de la ville de Saigon, nouvellement fondé, séparé de celui de Nha Be. Habituellement, un nouveau district attire beaucoup de gens qui viennent de partout, soit pour investir dans l’immeuble, soit pour s’y réfugier temporairement parce que les autorités semblent fermer les yeux ou qu’on peut trouver facilement du travail. C’est pourquoi les habitants de ce quartier profite de ce mouvement d’exode rural pour ramasser de l’argent en construisant des maisons en paillote pour louer aux « immigrés » à un prix abordable.

Le phénomène d’exode rural est une longue histoire très complexe qui tranche vraiment sur les activités de la ville dans plusieurs domaines. La plupart d’entre eux ne possèdent aucun métier spécialisé et sont normalement très peu instruits. Ainsi ils acceptent de faire n’importe quoi pourvu qu’ils gagnent de l’argent : marchands ambulants, maçons, porteurs, mendiants et aussi voleurs à l’occasion... D’un certain point de vue, ce phénomène d’exode rural a aussi son côté positif qui est de représenter une source importante de travailleurs. Les chefs d’entreprises aiment à embaucher ces « travailleurs-immigrés » pour des raisons suivantes : conditions de travail faciles, bas salaire, aucune plainte s’il faut faire des heures supplémentaires sans réclamer de primes, ce à quoi les travailleurs urbains ne s’intéressent pas.

Il faut croire que les pauvres supportent merveilleusement la misère. Pour le coucher, ils ont besoin seulement d’une surface de 2 m2, tout juste pour poser leur dos. La satisfaction des besoins essentiels et fondamentaux leur font défaut : de l’eau pure pour boire, des soins minimaux pour une bonne santé, des vêtements suffisants et propres, sans être propriétaire d’une maison, d’un morceau de terre... En un mot, les droits matériels sont frustrés, et ceux immatériels ont le même sort. Eux, ils restent en permanence dans l’insécurité sociale et en situation de crainte permanente : crainte d’être chassés par les autorités ou par les propriétaires. Ne figurant dans aucun livret de famille, ils n’ont pas droit de parole, leurs enfants n’ont pas d’acte de naissance, ce qui entraîne le refus des écoles ; il leur faut lutter continuellement pour la vie en cherchant à trouver de quoi manger, travailler pendant 10 heures ou plus par jour, assumer souvent de lourds et pénibles travaux, récupérer des ordures en respirant la puanteur du matin au soir,... mais parfois ils ne peuvent satisfaire à la demande de nourriture journalière et à tous les besoins fondamentaux de leur famille (photo, p. 452).

Il est vrai que la pauvreté diminue d’un certain de vue la qualité humaine, frustre un homme de tout ce qu’il a le droit de bénéficier. Les enfants, surtout, sont ceux qui supportent le plus de désavantages. Voici le témoignage d’un visiteur de ce quartier :

 « Je viens te visiter.

« Tu m’amènes chez toi à travers un hameau sinueux qui sent mauvais. L’eau d’évacuation, du lac, du lavage... tout se mêle en formant un courant d’eau noire, épaisse, coulant assez librement sur une terre jaunâtre... Mon petit frère mène une vie dans ce milieu-là sans aucun souci de l’hygiène, sans aucune attention de la garder pour les autres. Ou si tu en étais conscient, tu en serais quand même incapable.

« Tu m’invites à entrer dans ta “maison” pour que je voie à l’intérieur de ton pavillon de paille où tu demeures temporairement et où l’odeur de la fumée rôde encore quelque part. Chaque jour, ta mère doit se lever tôt pour faire cuire des maïs. Elle les transporte d’une ruelle à l’autre en invitant les passants à en acheter pour le petit déjeuner en espérant gagner quelque chose pour te nourrir.

« Je te quitte et j’embrasse toujours l’image de ta dentition perdue de quelques-unes, des dents jaunes comme des maïs que ta mère fait cuire tous les jours. Quand tes dents partiront-elles toutes ? Avec cette eau, avec cet environnement de vie, ce jour n’est pas loin, je pense.

« Je viens te visiter en un jour du printemps. Je viens te visiter en entendant la voix des enfants de ton âge en train d’épeler ê... a... résonnant dans une classe, quelque part de ce côté-ci et toi, tu erres au milieu du soleil de ce printemps, tanné par la chaleur, ce qui fait ressortir tes dents jaunies chaque fois que tu m’offres un sourire innocent et joli. Tes jambes, tes petites jambes, mais leur peau étant expérimentée, t’ont amené partout dans la rue, dans les bars, dans les restaurants pour mendier, pour inviter les passants à acheter quelques billets de loterie. Tu m’amènes chez toi, un “nid” dans un “ensemble de nids” couverts de paille ou de carton, un “nid” de 9 m2 suffisant pour un lit, une petite chambre pour 4 personnes : tes parents, toi et ton petit frère qui marche encore à quatre pattes. Ton père en me voyant arriver, prend “rapidement” une boîte de carton, la renverse pour inviter le “visiteur” à s’asseoir. Ton petit frère s’empresse de te demander de le porter. Quelle belle image, de te voir, un enfant de 7 ans qui sait déjà bercer son petit frère à la place de sa mère parce qu’elle est en train d’aller chercher de quoi te nourrir et à trouver 150 000 dông pour le loyer de ce “nid”. En te quittant, je te suis d’aller visiter un autre quartier en admirant ton agilité pour la vente des billets de loterie.

« Je viens te visiter un après-midi du samedi dans un hameau des gens immigrés du quartier Tân Hung. Une bande d’enfants se disperse à mon arrivée en riant et en parlant bruyamment : “Entre chez moi, maître !” Et chacun tient ma main, me tire de son côté.

« Dix ans auparavant, ce quartier était une banlieue de Saigon, appartenant au district de Nha Be. Les habitants qui y vivaient possédaient habituellement un vaste terrain. En réalité, ce ne sont qu’étangs et lacs, marécages ou rizières. À l’époque où la ville s’est développée, le district de Nha Be s’est divisé en deux et le nouveau porte le nom : 7e arrondissement de Ho Chi Minh-Ville. Les saïgonnais s’y précipitaient en masse pour acheter la terre à bas prix. Les gens venus des provinces se font pareillement de plus en plus nombreux. Ceux qui possèdent la terre flairent rapidement un moyen de trouver de l’argent en construisant des maisons couvertes de paille divisées en plusieurs “chambres” à louer. Le frais du loyer s’élève de 6 à 10 USD par mois sans compter eau et électricité. Les immigrés amènent habituellement toute leur famille et parfois des cousins ou des voisins et habitent dans une même maison en partageant le frais du loyer. Quand j’entre chez le petit D. je vois sa mère, sa tante et son oncle en train de faire frire les pistaches de terre préparant une sorte de bonbons pour la vente de demain. Ce métier demande peu de fonds et est facile à faire, c’est pourquoi plusieurs familles dans ce quartier l’adoptent. Toute la famille travaillant ainsi gagne environ 5 dollars par jour. Le petit D. fréquente actuellement des classes d’affection. En dehors des heures de classes, il va vendre les billets de loterie pour arrondir le budget familial. Sa mère lui a fait ces compliments : “fort remarquable, chaque jour il fait « consommer environ 100 billets et gagne 1,5 dollar”. Il est vraiment gentil, ce petit D., innocent et joyeux, toujours souriant en montrant ses deux dentitions où manquent quelques dents. Il ne se soucie pas de l’avenir qui l’attend.

« Certains autres enfants de 5 à 7 ans, un panier de roses à la main, sont entrés tôt dans la vie. Ils poursuivent les visiteurs, les supplient d’en acheter quelques-unes... et comme cela durant 10 à 12 heures de travail par jour ».

Les enfants démunis sont ceux que nous visons le plus. Personne n’est né pour choisir la vie dans la rue ou pour y mourir comme un animal. Est-ce, tout simplement, le fait de vivre dans la rue, de mendier, de ne pas manger suffisamment, de porter des vêtements en haillons, qui jette ces enfants en marge de la société ?

Ayant examiné ainsi le terrain et la gravité du problème, j’ai demandé à Sœur Marcel, de la Congrégation des Filles de la Charité de faire la démarche d’ouvrir des classes d’affection pour aider les enfants de ce quartier. Je ne me suis pas présenté aux autorités parce que la Sœur, âgée de 65 ans, semble très zélée pour cette activité. C’est à cause de cette demande qu’un frère conférencier, lors d’une retraite annuelle, a considéré avec une très mauvaise langue, la possibilité de l’ouverture de cette œuvre parce qu’on « s’est cachée derrière la jupe de la femme ». À la demande de Sœur Marcel, le responsable du quartier a donné son opinion très positive en disant que c’est une très bonne idée et même très nécessaire et utile pour la société. Je suis ravi de joie de la réussite de ce premier projet pour les enfants démunis et aussi de la possibilité de réaliser au moins une Proposition de notre Chapitre. Sœur Marcel et moi, nous commençons à préparer le jour de rentrée de la première classe en cherchant une enseignante ainsi qu’à une chambre à louer. Deux mois passés sans aucune réponse. J’ai dit à Sœur Marcel de venir s’en informer auprès des autorités du quartier et elle a reçu toujours la même réponse encourageante. Encore trois mois de silence, ce qui m’a fait réfléchir pour trouver une juste raison de ce silence. L’ayant vaguement découverte, en appliquant tout mon esprit créatif, j’ai tâtonné en cherchant un autre chemin pour accéder au but : faire connaissance avec les autorités locales par la voie d’activités sociales. J’ai contacté un agent de la Croix Rouge du 1er arrondissement et présenté mon désir de venir à ce quartier du 7e arrondissement pour une consultation et distribution des médicaments aux pauvres. Il est venu présenter cette proposition à la Croix Rouge du 7e arrondissement qui est heureuse de donner son accord. Il reste encore la date à fixer pour ce jour mémorable. Comme je ne connais rien, ni les médicaments, ni les docteurs et infirmières bénévoles, ni le déroulement d’une telle activité, j’ai donc recouru à Sœur Marcel qui était infirmière de l’hôpital GRALL pendant plus d’une trentaine d’années de service. Coup d’essai, coup de maître. L’organisation de cette journée humanitaire s’est déroulée avec succès. Y ont été présents les agents de la Croix Rouge du 1er et du 7e arrondissement, les autorités de ce quartier Tân Hung... Tout le monde est content, surtout la Croix Rouge du 7e arrondissement, parce qu’elle a quelque chose de très positif pour son rapport. Le représentant de la Croix Rouge me présentant à toutes les personnes de l’autorité, leur a signalé que je suis le bienfaiteur des pauvres, du quartier... et leur a promis d’ « y revenir » encore dans le futur. Pendant les moments disponibles intercalés des 3 heures de travail, j’ai cherché l’occasion d’aborder l’agent de la Croix Rouge du 1er arrondissement en lui disant de transmettre mon désir d’ouvrir des classes d’affection aux autorités locales. Le message est « envoyé » immédiatement et reçu aussi avec enthousiasme. Il y a une petite nuance et pourtant très importante à signaler, ce n’est pas moi qui assume la responsabilité d’organiser ces classes mais c’est la « Croix Rouge du 1er arrondissement en collaboration avec celle du 7e ». Étant ainsi entendu, j’ai commencé à dressé un plan de travail en partageant ainsi les responsabilités : les responsables du quartier recrutent les élèves, tout ce qui reste pour un bon fonctionnement conflue vers l’organisateur. Le jour J est fixé au 1er août 2000 à 8 heures du matin. Nous nous réjouissons d’inviter le Frère Visiteur, les responsables du quartier ainsi que les représentants de la Croix Rouge du 1er et du 7e arrondissement. Sœur Marcel a prévu aussi quelque chose en souvenir de ce jour considéré comme une réussite pour le service des pauvres. Tout est prêt. À 8 heures sonnées, 8 personnages étaient présents, mais aucun élève n’est arrivé. Sentant que quelque chose ne va pas, Sœur Marcel m’a chuchoté à l’oreille à 8 heures 15 : « je vais les “ramasser”, il y en a pleins dans la rue ». 10 minutes après, 24 premiers enfants errants du quartier entrent dans la « classe » et nous continuons les « cérémonies » d’ouverture. La première classe pour les enfants de la rue au quartier de Tân Hung du 7e arrondissement est née ainsi, pleine d’embûches et de méfiance de la part des autorités locales. Après deux semaines de fonctionnement, le nombre d’enfants s’élève à 40 et la classe doit être divisée en deux. Ceux qui savent déjà lire et écrire se groupent au niveau 2 du primaire. Après trois mois, les classes sont à peu près bien installées. Une année après, nous avons 4 classes : 3 classes du niveau 1 et une classe du niveau 2. Vers l’an 2002, j’ai fait la démarche pour ouvrir d’autres classes à un autre milieu, au hameau 1 du même quartier Tân Hung du 7e arrondissement. Grâce à la sympathie de la dame responsable de l’éducation du quartier, nous avons obtenu cette autorisation sans aucun problème. Aujourd’hui, en 2006, 195 élèves fréquentent nos classes d’affection, répartis en 11 classes du niveau 1 à niveau 5. Une vingtaine d’élèves ont fini leur cycle du primaire et poursuivent leurs études secondaires dans une école du gouvernement. Nous continuons à prendre en charge de leur frais de scolarité. Trois volontaires s’offrent pour donner des cours d’anglais pendant la fin de semaine.

On saisit ainsi ce que montre les théories de l’interactionnisme symbolique : la construction de nos mentalités et de nos projets dépendent des liens avec autrui.

Apparemment, les classes d’affection ont réussi. Mais peu des gens, même parmi les Frères, connaissent tous les troubles et dérangements que j’ai dû subir. Et d’abord, la question financière : En principe, le bureau d’éducation du district subventionne 0,80 dollar par tête et par mois. Grâce à la dame responsable de l’éducation du quartier, j’ai tout juste reçu cette subvention une seule fois en 6 ans. Cependant, des bienfaiteurs au courant de cette bonne œuvre nous ont prêté aide. Mais voici le problème : Il y a un jeune homme, nommé M. Cuong, qui entre fréquemment dans la classe en s’informant auprès de l’enseignante quel est son salaire, d’où vient l’argent pour payer tout ça... Les enseignantes lui répondent qu’elles ne sont pas au courant. C’est M. Tân qui est responsable et lui seul le sait. Il semble que la réponse des enseignantes ne le satisfait pas, c’est pourquoi il m’a convoqué au bureau en présence des responsables du quartier, des représentants de la Croix Rouge du 7e et du 1er arrondissement. Le contenu de la réunion tourne autour de la question de l’origine de l’argent. Ce qu’il désire savoir, d’après ce qu’il devine, c’est une organisation étrangère qui subventionne ces classes. Je lui ai répondu une fois pour toutes que notre Congrégation a beaucoup d’anciens élèves. En voyant cette œuvre utile, chacun contribue par une petite somme au bon fonctionnement de ces classes. C’est tout. Parce que, selon leurs désirs, l’argent doit passer par eux et non directement par l’organisateur, je lui ai reposé cette question : « j’en ai assez de vos perturbations. Si vous jugez que ces classes ne sont plus nécessaires et utiles ou que vous pouvez vous en occuper vous-mêmes, je vous les rends ». À l’unanimité, ils disent non. Et je continue à aider ces enfants jusqu’à ce jour tandis que ce monsieur-là ne me cherche plus de problèmes. Par contre, il semble qu’il devient sympathique en m’invitant à un café il y a un an.

***

À la fin du mémoire de maîtrise soutenu en 1997, j’ai suggéré quelques propositions qui ont rapport avec le problème des enfants de la rue :

- Fonder une école charitable d'application dans le territoire même du Scolasticat.

- Créer un centre pour s'occuper des enfants errants.

J’ai aussi soulevé une question qui est la sensibilisation des Frères en activité au problème des enfants de la rue, en faisant venir des spécialistes partager avec eux leurs expériences ou en introduisant dans le programme des études au Scolasticat des cours de sciences sociales et de pédagogie lasallienne qui aiderait les jeunes Frères à se familiariser avec la réalité de la vie.

Pour la proposition « Fonder une école charitable d'application dans le territoire même du Scolasticat » dans la propriété de la maison de retraite des Frères, cette suggestion n’a jamais été réalisée du fait de la complexité de l’obtention de l’autorisation du gouvernement. L’idée d’ouvrir une école auprès du scolasticat pour la pratique pédagogique de ces jeunes Frères persiste dans mon esprit car c’est un peu difficile d’imaginer la formation d’un éducateur sans l’étude et la pratique de la pédagogie. Dans la situation actuelle, avec ces classes d’affection ouvertes au 7e arrondissement devenant aujourd’hui un milieu de pratique en pédagogie pour les jeunes Frères et les étudiants qui viennent chercher à comprendre la vocation lasallienne, nous sommes contents de ce que nous pouvons réaliser. Au moins une partie de mon rêve est réalisée.

3e essai : ouverture des classes d’affection au 2e arrondissement

J’ai fait connaissance du président de la Croix Rouge du 2e arrondissement par l’intermédiaire de celui du 1er district. Vers l’an 2002, il m’a proposé une consultation et une distribution de médicaments pour un quartier de son district. C’est toujours la même tactique utilisée au 7e arrondissement en lui demandant d’ouvrir des classes d’affection au 2e arrondissement. À la première rencontre avec les autorités du quartier An Khanh, j’ai invité la responsable de l’éducation du 7e arrondissement que je connais à m’accompagner. En fin de compte, j’ai aperçu que j’avais fait une gaffe car elle a dévoilé toutes les faveurs financières en vue des classes pour les enfants démunis, ce qui a semé une antipathie entre le responsable de l’éducation de An Khanh et moi. D’ailleurs, j’ai découvert que le but de cette rencontre n’était autre chose que l’accord de subvention de classes déjà existantes. Je ne peux pas donc organiser ces classes comme j’ai fait au 7e arrondissement. Je présente ensuite une Sœur de la Congrégation des Amantes de la Croix qui habite dans ce même quartier pour me remplacer comme agent social de ces classes. C’est une occasion pour elle de pouvoir désormais venir dans ce quartier officiellement, visiter les familles démunies et les aider au cas de besoin. C’est un de mes échecs.

4e essai : ouverture d’autres classes d’affection au quartier Rach Dia.

Rach Dia est un autre quartier du 7e arrondissement. Certains enfants de ce quartier fréquentent aussi mes classes à Tân Hung et me racontent que beaucoup d’enfants comme eux ne peuvent pas venir à l’école située très loin, entre 4 à 5 kilomètres de distance. Récemment, leur enseignante m’a mis au courant du besoin de ce quartier et surtout m’a fait faire connaissance d’un certain personnage en mesure de nous aider pour les formalités auprès des autorités locales. Je le contacte donc par téléphone. Il m’a affirmé qu’il a « travaillé » déjà avec les autorités locales, qu’elles sont d’accord à l’unanimité et il m’a conseillé de téléphoner directement à la vice-responsable du quartier. Ravi, je lui ai téléphoné donc et elle m’a demandé ce que ce je fais, qui je suis... et conclut que c’est une très bonne idée de collaborer avec le quartier pour aider les enfants démunis et qu’elle va présenter ce projet à son supérieur... J’écris ces lignes, après 5 mois d’attente silencieuse. Encore un autre échec. Tout cela pour dire qu‘en tant que religieux, on n’est pas chaleureusement reçu même pour s’offrir à faire quelque chose d’humanitaire.

5e essai : centre de formation professionnelle de TAM NONG

Tram Chim ou Tam Nong est un arrondissement de la province de Dong Thap, au sud du Viêt-Nam.

En l’an 2000, Frère Fortunat, de la communauté des Frères vietnamiens aux États-Unis, m’a présenté son désir de venir au secours des victimes de l’inondation pour 5 villages et pendant l’époque de Noël de cette année-là, un groupe de jeunes américains d’origine vietnamienne y vinrent pour leur donner cadeaux et argent directement. À l’époque, tout secours devait passer par les autorités locales. Il fallait donc trouver quelqu’un qui ose organiser cette activité sans rencontrer de problèmes. Tram Chim, sous la direction du prêtre Nguyen van Luy, fut l’une des cinq paroisses qui acceptèrent cette condition.

Ayant pour objectif de venir vers les pauvres dans les régions retirées, le Frère Fortunat s’offrit pour donner une session de pédagogie catéchétique pendant deux semaines, à la paroisse de Tram Chim au début de l’an 2001. Une semaine après son arrivée, j’ai reçu un coup de téléphone de sa part me donnant un rapide rapport de sa session et il m’a demandé : « est-ce que tu désires acheter un terrain pour les Frères ? ». Au Vietnam actuellement, l’investissement dans l’immeuble gagne catégoriquement. Dans ma tête, je pensais que si Frère Fortunat me proposait l’achat d’un terrain, c’est pour une question financière du district, car les Frères sont en train de chercher un « chemin » pour pouvoir accéder à l’auto-suffisance. Je lui donne mon acquiescement après l’avoir présenté au Frère Visiteur de l’époque : Frère François Trân van Anh. Il a acheté donc 6 lots de 5 m x 30 m. Chaque lot coûte 1 500 USD.

Ayant obtenu la terre, je commence à mijoter un plan possible pour l’installation d’une nouvelle communauté sans tomber dans l’ornière comme à Dak-Mil en 1999. Vers le mois de février 2002, Frère Fortunat m’a poussé à faire un second pas en me donnant 10 000 dollars pour y construire la maison. J’ai cherché donc un architecte pour dessiner le plan d’un centre de formation professionnelle sur ce terrain de 900m2. J’ai commencé à bâtir le premier bâtiment avec l’argent reçu. Le curé m’a aidé à compléter tous les papiers nécessaires pour être en règle. Un de ses paroissiens est dessinateur et travaille dans le bureau du Service des maisons et de la terre qui est changé de nom plus tard en « Service de ressources d’environnement ». Il a accepté de redessiner le premier bâtiment et de demander l’autorisation de construction. Quand la maison fut à demi achevée, des bruits coururent annonçant un mécontentement de la part des autorités locales : la maison n’avait pas de « façade », ce qui rend « indigne la beauté de la rue ». Quelques jours après, c’est le même dessinateur qui, se mettant en colère avec un Frère surveillant du chantier, est venu menacer de retirer l’autorisation parce que la maison « ne ressemble pas à l’ensemble général » du quartier. J’ai appris ce qu’il lui était gravement reproché par ses chefs qui lui demandaient le but de cette maison, parce que selon leurs observations, son style lui-même faisait démasquer une « future école », mais qui avait donné l’autorisation de construire une école ? Le dessinateur s’est vraiment affolé. Et il ne savait que faire sinon déverser son affolement sur nos têtes par sa colère.

De mon côté, je me « triturais les méninges » pour trouver une solution parce que l’expérience me faisait présager un futur peu favorable. Il fallait agir vite. J’ai demandé au Frère Valentin QUI s’il connaissait quelqu’un qui pouvait me tirer de cet embarras et il m’a présenté M. Trân Công Sanh, un ancien juvéniste d’avant 1975 qui semblait très expérimenté dans ces affaires-là. Le rendez-vous eut lieu 2 jours après chez le Frère Valentin QUI et M. Sanh promit de faire ce qu’il pouvait sous toute réserve. Nous convînmes de venir sur place dans 2 jours pour nous renseigner sur la démarche à entreprendre pour ouvrir un centre de formation professionnelle. Nous nous rendîmes à Tràm Chim un mardi du mois d’octobre 2002. À l’arrivée de Tram Chim, M. Sanh est entré directement au bureau du Comité populaire du district pour se renseigner. Très bien reçus à l’accueil, la réceptionniste nous a envoyé à M. Nguyen Thanh Kiem, dans un autre bureau à un kilomètre de là. En écoutant attentivement notre souhait, M. Kiem nous a posé des questions sur le propriétaire du terrain et sur l’assise matérielle du projet et nous a fait savoir que seul le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de la province de Cao Lanh, situé à une distance de 37 kilomètres, pouvait donner l’autorisation et il nous a donné rendez-vous à Cao Lanh à 14,00 heures du même jour pour nous présenter au directeur du Service.

Nous voilà au bureau du Service des Travaileurs, des Invalides de guerre et de la Société. Après la présentation de M. Kiem, M. Sanh présente son souhait de fonder un centre de formation professionnelle en collaboration avec M. Nguyen Van Tan, propriétaire. Le secrétaire lui a donné le dossier et lui a montré soigneusement ce qu’il faut remplir et lui a promis l’aide.

Une semaine après nous retournons à Cao Lanh avec un dossier complet. Avant de déposer le dossier, M. Sanh nous amène au bureau de l’une de ses vieilles connaissances : M. Bang Son, qui est vice-directeur du centre de formation professionnelle de la province de Cao Lanh. Tous les deux débordent de joie en se rencontrant. M. Sanh présente enfin le but de sa venue à Cao Lanh. En entendant cela, l’autre prend un air réfléchi, fronce les sourcils et dit enfin à M. Sanh : « Pourquoi tu viens dans ce coin-là pour l’investissement ? Si tu désires “faire le commerce”, je t’indiquerai ce qu’il faut faire. Tu ne gagneras rien en développant ce projet dans cette région retirée ». Comme je le lui ai soufflé à l’avance, M. Sanh répond que lui et « certains de ses amis sont d’anciens élèves d’un maître originaire de Tram Chim. Nous réalisons ainsi le désir de notre maître qui veut faire quelque chose de bien pour son pays natal avant... sa mort ». En entendant cela, M. Bang Son a répondu : « Si c’est comme cela, je t’aiderai de tout mon possible ». Nous quittons M. Bang Son et nous nous dirigeons vers le bureau du Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société. En nous voyant, M. le secrétaire est un peu étonné par notre rapidité et invite M. Sanh au bureau du directeur. Après une heure environ de contrôle du dossier et d’« interview », il a accepté le dossier et a demandé le jour où ses hommes pourront venir au futur centre pour « juger et décider ». Il a proposé le 10 novembre, une dizaine de jours après, et nous proposons le 15, parce qu’il faut équiper les salles de travaux pratiques de couture et d’informatique. Par ailleurs, la construction de la maison n’est pas encore complètement finie.

Pendant une période de 15 jours nous devons finir en même temps la construction, le transport et l’installation de 15 machines à coudre et 10 ordinateurs. Le matin du 15 novembre, 2 personnes représentant le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société sont venues pour vérifier l’adéquation entre ce qui est décrit dans le dossier et la réalité. Le rapport de « jugement et de décision » est tout à fait « bon » et « capable d’une bonne formation ». Tout le monde a poussé un soupir de soulagement. La première étape est passée et nous n’avons qu’à attendre l’« autorisation de fonctionnement ». Grâce au « lubrifiant » de la part de M. Sanh, nous avons obtenu ce papier deux semaines après (photo, p. 453).

Nous préparons ensuite le jour de l’inauguration. Noël 2002 va bientôt arriver. Cette année-là je fêtais Noël à Tram Chim avec M. Sanh. Nous avons quitté Saigon vers 10 heures du matin et nous sommes arrivés à Cao Lanh vers quatorze heures. L’atmosphère de Noël dans la ville m’a suggéré d’acheter quelque chose pour décorer la nouvelle maison en ce jour de fête. Nous nous arrêtâmes alors à une boutique au centre de la ville. Après une demi-heure environ de choix, nous avons acheté ce qu’il faut pour égayer le quartier. Subitement, M. Sanh arrêta la voiture en voyant un monsieur stopper son vélomoteur sur le trottoir. Il descendit de la voiture pour le saluer. Après un petit moment de surprise, tous deux se sont serrés la main avec une joie inexprimable. M. Sanh l’a invité à une cafétéria non loin de là. Ils se sont racontés des anciens souvenirs du temps où ils travaillaient ensemble il y a plus de dix ans. Aujourd’hui il tient une place assez élevée dans l’administration du gouvernement. M. Sanh l’a mis au courant de ce qu’il a projeté à Tram Chim et l’a invité d’y venir au jour de l’inauguration.

Il y avait environ une cinquantaine d’invités aux cérémonies d’inauguration du centre. M. Sanh a largement envoyé des cartes d’invitation à un grand nombre des autorités de la province et du district de Tram Chim. Mais au niveau de la province, il n’a y eu que ce monsieur qui est venu y participer. Il a dit sincèrement à M. Sanh la raison de sa présence à tout prix, c’est pour soutenir l’œuvre de M. Sanh. Et c’est vrai que sa présence en ce jour, surtout à travers son comportement très ouvert et son discours de souhait d’un bon développement du centre dans l’avenir..., ont un peu changé de regard des cadres présents. Pourquoi cela ? Dès le début, les autorités locales étaient persuadées que cette maison appartenait à la paroisse ou plutôt au curé. Ils ont raison parce que c’est lui qui a fait toutes les démarches auprès des autorités à ma place pour acheter ce terrain. J’ai dû leur affirmer et réaffirmer à maintes reprises que le curé m’avait aidé à remplir toutes les formalités pour acheter le terrain, c’est tout ; et que pour le reste, j’avais tout fait. Le curé n’a aucune brique de sa part dans cette maison. Ils ont gardé le silence sans y avoir beaucoup cru. Après 3 ans de fonctionnement, le Frère Joseph Vinh a fait la demande de finir le plan original. Le spécialiste a redessiné le plan et mis à l’en-tête « Église... ». Et le Frère Joseph l’a forcé à le corriger. Ce petit détail montre que dans l’esprit des autorités, cette idée d’appartenance à l’Église est profondément gravée dans leur esprit.

Les Frères y ont formé une nouvelle communauté depuis juillet 2002. Ils ne participent pas aux activités de l’église sauf à leurs devoirs de chrétiens, pour éviter des commentaires inutiles. Sous les yeux des autorités locales, ils sont des enseignants du centre.

Après 3 ans, ils ont réussi à établir une bonne relation avec les autorités locales et avec les voisins. Ils ont trouvé leur place dans ce quartier retiré malgré les difficultés rencontrées au commencement. La maison est construite et agrandie, ils ont fait la démarche pour l’élever au niveau d’un « Centre de formation professionnelle privé ». Les formalités sont accomplies, il ne reste plus qu’à attendre le résultat et à continuer de se développer. Les obstacles ont été surmontés (photo, p. 454).

6e essai : projet de créer un centre de post-détoxication.

En l’an 2002, j’ai soumis au Conseil du District le projet d’ouvrir un centre de guérison de l’opiomanie dans la vaste propriété du noviciat à Tân Cang, province de Dong Nai, à 50 kilomètres de Saigon. Dès son accord, j’ai commencé à me renseigner auprès des spécialistes à la fois sur les formalités et sur le fonctionnement d’un centre de guérison pour les toxicomanes. Un jour, un monsieur, dit architecte, est venu offrir son « aide ». Avant de signer un contrat, je lui ai posé quelques questions à éclaircir :

-         Qui signe la demande ? Un civil ou un représentant de l’Institut ?
Cette question est posée parce qu’il est important de bien connaître la politique du gouvernement par rapport aux organisations religieuses. Il m’a affirmé qu’il faut signer « en tant que religieux » parce qu’aujourd’hui « la religion catholique est très forte ». Je ne sais pourquoi j’ai suivi son opinion quoi que plusieurs personnes m’aient donné conseil de laisser un civil signer.

-         Le frais de la commission ? - Rien. Aide gratuite.

-         Combien de mois pour obtenir l’autorisation ? – trois mois.

Je lui ai passé le dossier avec la signature du Frère Tran van Anh, Visiteur et de mon nom, celui qui a dressé le projet. Un mois passe : aucun avancement. Après deux mois : toujours sans réponse. À la fin du troisième mois, je l’ai obligé de dire la vérité sinon bon gré mal gré, je retire mon dossier. Il m’a avoué enfin qu’il était dans l’impossibilité d’accomplir sa mission parce que cela touchait les « affaires religieuses ».

Après cet échec, j’ai continué à chercher un autre chemin. Sœur Marie Hoa, de la Congrégation des Amantes de la Croix m’a présenté enfin un autre monsieur appelé Lê Thanh Ba, qui habite à Dong Nai même, et est à la fois un cadre  et le vice-président en retraite du Comité du Peuple de cette province. Il m’a initié à rédiger de nouveau le projet soigneusement. Le 17 novembre 2002, Le Frère François Anh et moi, nous sommes convoqués au Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de la province de Dong Nai pour expliquer officiellement notre projet en présence de toutes les autorités concernées. La réunion s’est terminée dans une atmosphère amicale et pleine d’espoir. Le président du Service a confié la responsabilité de modifier quelques détails du projet à M. Le Thanh Ba et à M. le président de l’office de prévention et de lutte contre la drogue de décider.

Et parce qu’il existe un programme de formation professionnelle dans le projet, il nous faut donc venir le présenter au bureau de formation professionnelle. Après avoir obtenu le rendez-vous, M. Le Thanh Ba et moi, nous sommes venus voir la présidente. Nous avons été ravis par l’appréciation très positive et la promesse d’aide et de soutien de la part de cette présidente.

La procédure des formalités se déroule selon cet itinéraire : d’abord l’approbation positive du Comité de peuple du village ; ensuite celle du Comité du peuple du district où se situe le centre ; l’ayant obtenue, le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de la province donne ensuite son approbation ; après avoir obtenu l’approbation positive de la part du Service de la province, on la retourne au Comité du peuple du District, et c’est lui qui délivre l’autorisation de fonder le centre.

Le chemin est long et demande beaucoup de temps. Il faut venir et revenir plusieurs fois à chaque bureau parce que, lui, il a tout pouvoir. Je me suis trouvé dans l’obligation de demander l’aide du délégateur qu’est M. Tran Cong Sanh, un bon « diplomate ». Je le présentais d’abord à M. Lê Thanh Ba qui se montrait très sûr du résultat de ce qu’il avait entamé avec beaucoup de promesses. De son côté, M. Sanh cherchait à comprendre l’opinion des autorités du district pendant que moi, je prenais contact avec un policier de lutte contre la drogue de ce district même pour une négociation avec le Comité du peuple. Ce qui est un peu paradoxal : le fils de ce policier de lutte contre la drogue est dépendant de la drogue !

M. Sanh m’a mis au courant du contact de son disciple au président du Comité du district. La nouvelle était très mauvaise et il a conclu qu’il était impossible d’ouvrir ce centre et m’a conseillé d’abandonner ce projet à Tân Cang. Mais au début du mois de janvier 2003, je fus convoqué par la vice-présidente du Comité du district à ce sujet. Y étaient présents Frère François Anh, M. Sanh et moi-même. Après que nous ayons présenté notre projet, la vice-présidente l’a bien apprécié et nous a encouragés de le réaliser en faveur des jeunes dépendants de la drogue. Nous avons reçu enfin une note officielle signée le 18 janvier 2003, par Mme Nguyen Thi Hoang Trinh, vice-présidente du Comité populaire du district :

Long Thành le 28 janvier 2003

« Comité du peuple de la province de Dong Nai

« Comité du peuple du district de Long Thành

« No : 42/UBH

Examinant la demande de fonder un centre de formation professionnelle TAN CANG, après la rupture de la dépendance, à Tan Cang, quartier Phuoc Tan, district de Long Thanh de M. Tran Van Anh, domicilié à Tan Cang,  quartier Phuoc Tan, district de Long Thanh, province de Dong Nai, après avoir fait un contrôle sur place, selon les propositions des autorités compétentes du district, le Comité du peuple propose :

-             « [...]

-             « 1) le terrain :

-             « Le Comité du district de Long Thang propose au Comité du peuple de la province de Dong Nai, au Service des Travailleurs, des Invalides de guerre et de la Société de la province de Dong Nai et à toutes les autorités  compétentes de la province qu’ils examinent et autorisent le projet de formation professionnelle après la rupture de la dépendance de Tan Cang, à être fondé dans notre district ».

« Vice-Président,

« signature et cachet

« Nguyen thi Hoang Trinh

Pour raccourcir le temps, nous avons transmis par nous-mêmes cette note officielle ci-dessus au bureau du Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de la province de Dong Nai. En principe, nous devions obtenir l’opinion positive du Comité du peuple du village c’est pourquoi, M. Hai, président du bureau de la Prévention et de lutte contre la drogue nous a accompagnés lui-même au village de Phuoc Tan pour demander la signature. Nous avons reçu enfin cette réponse signée le 10 février 2003 par le vice-président Truong Huu Lôc de la part du Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de la province :

« Comité du peuple de la province de Dong Nai

« Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société

No : 11/LĐTBXH

A Biên Hòa le 10 février 2003

« Le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société a reçu votre demande, né le 22 septembre 1945, domicilié au numéro 146/42B Vo Thi Sau, district 3, Ho Chi Minh-Ville, No de carte d’identité 020532950 ; profession : directeur du centre de formation professionnelle de Duc Minh, au sujet de fonder un centre de post-détoxication installé à Tân Cang, district de Long Thanh, province de Dong Nai.

À votre demande, le Service a organisé une réunion des autorités compétentes telles que : office de prévention et de lutte contre la drogue, office de formation professionnelle,... Après avoir entendu les opinions et le rapport de ces bureaux, en se basant sur la politique et les loi du gouvernement et sur la réalité locale du phénomène des toxicomanies,  Le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société décide :

1- Option : Le Service décide à l’unanimité de donner l’autorisation à M. Nguyen Van Tan de fonder un centre de détoxication avec la fonction et « la responsabilité post-détoxication conformément à l’objectif 6 « (dépendance de la drogue) à Tân Cang, quartier Phuoc Tan, district de « Long Thanh, province de Dong Nai.

« 2- Pour avoir des bases d’examen, il est exigé de M. Nguyen van Tan de produire les documents suivants :

a) La demande de fonder ce centre accompagnant le CV du demandeur.

b) Les statuts de fonctionnement du centre.

c) Des papiers légaux tels que : propriété de la terre, livret de famille des personnes qui ont rapport avec la demande

d) Le certificat d’habilitation d’exercer des responsables de la médecine, de la formation professionnelle et du principal comptable.

3- Après avoir reçu tous les papiers demandés, le Service ayant examiné et présenté au Comité du peuple de la province donne l’autorisation de fonder le centre de détoxication au district de Long Thanh et confie au Comité du peuple de Long Thanh la délivrance de la « Décision de fondation. Après avoir reçu la Décision et quand le « directeur du centre a réalisé complètement les directives des Services « concernées », le Service des Travailleurs, des Invalides de guerre et de la Société délivrera la licence de « fonctionnement ».

« M. Truong Huu Lôc

« Vice-président du Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société

« Signature et cachet »

Un autre papier signé par la même vice-présidente Nguyen Thi Hoang Trinh, du Comité du peuple du district de Long Thanh le 12 mai 2003, certifie que « l’investisseur a le droit de changer le but de l’utilisation du terrain selon les lois actuelles et le terrain figuré dans la carte n’est pas dans le planification du gouvernement ».

Tout a été donc en règle.

Normalement, une fois ce papier délivré, on est presque sûr que la démarche est arrivé à son terme. Ainsi, avec l’accord de M. Hai, chef de l’office de prévention et de lutte contre la drogue, M. Sanh a commencé la construction au mois de mai 2003. Aux cérémonies de pose de la première pierre, étaient présents tous les représentants des autorités concernées de la province et certains responsables « sympathisants » du district de Long Thanh et une vingtaine de Frères parce que c’est considéré comme un événement très important du district : depuis 30 ans, c’est la première organisation reconnue par les autorités en tant que religieuse.

Etant sûr que l’ouverture du centre est proche, à la fin du mois de juin, comme d’habitude, j’ai nommé le Frère Directeur et deux autres Frères comme membres de cette nouvelle communauté.

Au début de juillet 2003, un ordre venu du district de Long Thanh nous a interdit toute construction et j’ai reçu en même temps une convocation des autorités du district de Long Thanh. Y étaient présents toutes les autorités concernées de la province, du quartier et du district de Long Thanh, soient environ 25 personnes, présidée par Mme Hoang Trinh, celle qui a signé les papiers délivrés par le Comité du peuple du district de Long Thanh. A la réunion, elle m’a demandé de présenter le but du centre (ce que j’ai fait plusieurs fois) et a entendu les opinions des autres. Celui qui est contre la fondation de ce centre est un certain monsieur nommé Hai Viêt, président du Comité du Parti communiste de ce district. Quelques jours après cette réunion, Mme Nguyen Thi Hoang Trinh m’a envoyé un courrier dont le contenu est la réflexion de cette réunion :

« Comité du peuple de la province de Dong Nai

« Comité du peuple du district de Long Thanh

« No : 361/UBH

A Long Thanh le 04 juillet 2003

« Au président du Comité du peuple de la province de Dong Nai,

« [...]

« Après la réunion, le Comité permanent du Comité du District du Parti « est d’accord de ne pas autoriser d’étendre le projet du centre de désintoxication présenté par M. Tran Van Anh, à Tan Cang, village de Tan Cang, district de Long Thanh par ces raisons :

-         « Le projet n’est pas réalisable, n’est pas accepté par le peuple, collectivités et autorités locales surtout le choix du nom Tân Cang, celui d’un hameau du village de Phuoc Tan pour nommer un centre privé de désintoxication n’est pas accepté par le comité du Parti du village de Phuoc Tan, ce qui fera créer des attitudes de mécontentement dans le village.

« De plus, dans le territoire du district de Long Thanh, les autorités compétentes de la province ont donné l’autorisation d’ouvrir un village des métiers investi largement par les autorités du 5e arrondissement de Ho Chi Minh-Ville, visant le but d’apprendre un métier aux toxicomanes et prioritairement à ceux qui habitent dans ce district. Ainsi, la création d’un autre centre de formation professionnelle post-désintoxication n’est plus nécessaire.

-           « Actuellement, le projet de désintoxication Tan Cang dont la construction est proposé s’inscrit dans une planification du développement industriel, de petit artisanat industriel, et du parc public Son Tien. Une évaluation concrète de toutes les branches compétentes de la province et du district est nécessaire pour évaluer l’influence du problème de l’environnement de l’éducation du centre, de l’administration des sujets et de la situation de discipline et de sécurité du village.

Dans le temps où les formalités de construction ne sont pas encore finies, il propose à M. Tran Van Anh de ne pas continuer à construire ce centre à Tan Cang, village de Phuoc Tan, district de Long Thanh, d’exécuter sérieusement toutes les formalités selon les prescriptions du gouvernement actuel ainsi que les opinions des autorités compétentes de la province et du district.

« Comité du peuple du district de Long Thanh

« Vice-président

« Nguyen Thi Hoang Trinh

« signature et cachet.

Quelques commentaires

Les raisons données dans cette note officielle signée par la même dame Nguyen Thi Hoang Trinh sont contraires à celles qu’elle m’avait envoyées le 28 janvier 2003 citée plus haut :

«.... autorisent le projet de “formation professionnelle après la rupture de la dépendance de Tan Cang”, à être fondé dans notre district ».

-            Choix du nom Tân Cang : Le nom du centre n’est pas une raison pertinente pour refuser une demande ! Il n’est pas difficile de le changer.

-            l’existence déjà d’un centre : C’est vrai qu’il est dans un même district mais situé à une distance supérieure à 50 kilomètres. D’ailleurs, ce centre appartient au gouvernement et les gens y sont envoyés par force tandis que notre centre est un centre privé et ceux qui y entrent doivent être volontaires et désirer dès le début de refaire leur vie.

-            le centre est situé dans la planification de la province : le papier signée le 12 mai 2003 par Mme Nguyen Thi Hoang Trinh ayant certifié que “le terrain figuré dans la carte n’est pas dans la planification du gouvernement”. Cette fois-ci elle l’a signée, contrairement à ce qu’elle écrit.


 

Pourquoi ce paradoxe ? Il y a eu au cours du déroulement de la réunion, un « petit » point que Mme Hoang Trinh ne signale pas dans ce rapport et je pense que ce « petit » point posé par M. Hai Viet a fait pression sur Mme Hoang Trinh l’incitant à dire complètement le contraire. À savoir que M. Hai Viêt est président du comité du district du Parti, il ne signe aucun papier mais personne n’ose signer s’il dit non. Or, pendant cette réunion il a posé cette question sans réponse : « Qui sait ce que vous faites là-dedans ? Sinon, il arrivera des détails fastidieux comme c’est arrivé à Tra Cô. Qui ose signer, signe. Je ne signe pas ! ». Il reprend l’histoire de Tra Co pour nous massacrer. Cet événement est arrivé déjà quelques années auparavant mais les autorités concernées ne peuvent pas l’oublier. C’est l’histoire des paroissiens de Tra Co de la même province de Dong nai, qui ont organisé une manifestation pendant une dizaine de jours en s’asseyant au milieu de l’autoroute nationale pour s’opposer aux autorités locales ayant voulu s’emparer du terrain de l’église paroissiale pour construire un marché. Le gouvernement central a dû envoyer ses hommes pour la négociation. C’est pourquoi, quand M. Hai Viet pose cet question qui a rapport avec la politique et qui est un point très sensible aux autorités, comment Mme Hoang Trinh oserait-elle dire le contraire ?

Nous avons déjà dépensé 120 mille dollars pour la construction. Au début, ils nous ont obligés de tout démolir. M. Sanh a négocié à plusieurs reprises et a dépensé une grosse somme pour transformer cette maison en un atelier de couture d’une compagnie nommée Thien Chi. Voilà 3 ans passés, cette compagnie n’a pas encore terminée sa construction et la planification dite par Mme Hoang Trinh, s’il y en a, reste figée dans ses principes (photo, p. 455).

Sur ma demande, M. Sanh continue de faire la démarche pour ouvrir un centre de cette catégorie en un autre lieu. Cette fois-ci, ce n’est pas un religieux qui signe de son nom la demande, mais un civil, la femme de M. Sanh. Le chemin est sinueux et plein d’embûches à tel point que j’ai failli abandonner en cours de route. Les sources financières sont taries. La « Décision de fonctionnement » n’a jamais été reçu. Les autorités dites « compétentes » y sont venues continuellement l’une après l’autre pour « juger et décider » sur sa pertinence par rapport au but du centre. Chaque visite se termine immanquablement par un festin au restaurant accompagné des rires, plus d’une enveloppe et surtout il y aurait toujours ceci ou cela à compléter. C’est une bonne occasion d’acculer le propriétaire à l’acceptation de payer un prix 5 ou 6 fois plus cher. Il exige par exemple, un système de prévention et d’extinction dans le centre. Les pompiers locaux sont venus examiner le terrain et proposent un prix qui dépasse l’imagination de tous : 20 000 dollars. Le prix donné par un autre office hors de la province n’atteint même pas 4 000 dollars ! Mais, l’installation de celui-ci subit toujours une évaluation « sans atteindre l’objectif » donc n’est pas reconnue comme « valable ». On n’a pas d’autre choix (photo, p. 456).

 Mais enfin de compte, le but est arrivé et le centre a reçu la « Décision de fonctionnement » au mois de mai 2006. Actuellement, nous finissons quelques petits détails pour recevoir les premiers toxicomanes au mois de novembre 2006.

7e essai : école primaire TRUONG VINH KY - à Pleiku

Tout en étant conscients que l’école n’est qu’un « moyen privilégié », mais pas unique, pour vivre notre vocation d’éducateur, nous recherchons quand même sans cesse l’occasion pour récupérer ce moyen au « moment propice ». En 2002 (encore en 2002 !), j’ai appris que M. Sanh était parti sur les hauts-plateaux. Je lui ai donc téléphoné pour lui souhaiter « bon travail ». Une idée d’ouvrir une école sur les hauts-plateaux pour les minorités (ou les pauvres en général) est survenue dans ma tête et je lui ai posé une question aléatoire : Tu « connais » quelqu’un à Kontum ou à Pleiku ? Il m’a donné une réponse positive. Je lui ai présenté donc mon désir d’ouvrir une école du primaire pour les minorités ethniques. Pendant son séjour de quelques jours à Pleiku, il s’est renseigné auprès de ses amis et a « déniché » la vice-présidente du Service de l’Éducation et de Formation de la province de Gia-Lai (Pleiku) qui l’a reçu gentiment et a promis de l’aider avec plaisir. Il m’a mis au courant tout de suite de cette nouvelle et m’a proposé d’y envoyer un Frère pour lui présenter ce que nous désirons exactement. Frère Valentin Qui est choisi pour cette mission comme « avant courrier ». Son rapport après l’échange avec elle était  encourageant. M. Sanh est donc « désigné » pour faire le premier pas en cherchant un terrain. Il en a trouvé enfin un, de 2 000 m2, situé à 15 kilomètres de la ville de Pleiku, à la frontière du village des vietnamiens et des minorités ethniques. Le prix est fixé à 5 000 dollars. J’ai donc recours au Frère Fortunat qui donne sans hésitation son accord. Vient ensuite la seconde étape qui est un problème bien complexe. D’abord, il faut effectuer les formalités pour être propriétaire de ce terrain, puis celles pour ouvrir une école privée.

La seconde étape est la plus importante et difficile. Quelle raison pertinente présenter aux autorités locales pour ne pas semer la méfiance ? Etant directeur d’une compagnie d’importation et d’exportation, M. Sanh a utilisé son droit à la fois pour acheter le terrain et fonder l’école. Je ne sais pas comment il a trouvé un certain monsieur Minh, inspecteur des écoles du sud du Vietnam. Nous nous rendîmes tous les trois, M. Sanh, M. Minh et moi, à Pleiku. M. Minh a convoqué des responsables du Service de l’Éducation et de Formation de la province de Pleiku pour quelques informations concernant l’organisation de ce Service et nous a présentés à la fin, M. Sanh et moi, en abordant le projet d’ouvrir une école du primaire au district de Dak Doa. En principe, ils sont tout à fait d’accord mais puisque c’est une école du primaire, il faut « travailler » avec le bureau de l’Éducation du district de Dak-Doa. Le vice-président s’offrit de nous y conduire tout de suite dans l’après-midi pour nous présenter à toutes les autorités compétentes de ce district : bureau de l’Éducation et comité du peuple du district.

Après cette présentation, M. Sanh commença pas à pas la démarche pour l’ouverture de l’école. Pendant ce temps-là, il découvrit un autre monsieur de vieille connaissance, un agent de police à Pleiku qui vient de temps en temps à Dak Doa en accompagnant M. Sanh. Bien que le bureau de l’Éducation administre ces écoles du primaire, la décision reste entre les mains du président du comité du peuple. Par diplomatie,  M. Sanh est devenu « bon ami » de celui-ci qui a promis aussi de l’« aider ». Pour le début, le dossier essentiel pour ouvrir une école se compose d’un directeur et sous-directeur avec un diplôme légalement adéquat en pédagogie. Pour le directeur, en dehors du diplôme, il faut en plus cinq ans d’expériences dans l’enseignement et s’il est un cadre, c’est merveilleux. Nous avions bien Frère Joseph Quân, diplômé en pédagogie du primaire, mais il lui manque la 2e condition : l’expérience. Aussi avons-nous dû chercher partout une personne de confiance pour lui confier le rôle de directeur et Frère Quân tiendra la place de sous-directeur. Enfin, une enseignante d’une école à Saigon en retraite accepta volontiers de collaborer avec nous. Le dossier était donc complet.

Évidemment il fallut venir plusieurs fois et avec du « lubrifiant » pour pouvoir obtenir enfin l’autorisation d’ouvrir l’école au début du mois d’août 2004 qui porte le nom « École du primaire Truong Vinh Ky ». En croyant fermement à la promesse du président du comité du peuple du district, nous avions prévu l’inauguration de cette école cette année scolaire 2004-2005. Les quatre pionniers  sont Gustave Duc, Directeur, Thomas Nghi, Joseph Quân et Michel Truoc (minorité ethnique) (photo, p. 457).

C’est bien vrai que « l’homme propose, Dieu dispose ». L’averse pendant ces mois nous a fait arrêter tous les travaux d’infrastructures inachevés. Frère Gustave Duc fut envoyé à Tram Chim pour quelques mois, Frère Dosithée Nghi est venu là au mois de février, Frère Joseph Quan n’est arrivé qu’au début d’août et Frère Michel Truoc, à la fin du mois de juillet tandis que l’ouverture a besoin de bien de préparations avant la rentrée.

M. Sanh et Frère Gustave avec l’aide des employeurs ont pris la « ferme décision d’ouverture cette année, même s’il n’y aura qu’un seul élève ». La pluie cessait facilitant ainsi la continuation des travaux inachevés. Aussi, travaillèrent-ils nuit et jour pour cimenter la cour d’honneur, envoyer des cartes d’invitation et des publicités, mettre en ordre les classes... tout ce qu’il fallait pour la rentrée. Ils ont terminé tous les travaux juste à temps.

Au jour de la rentrée, il y avait environ une cinquantaine d’invités de la part des autorités locales, y compris son ami policier accompagné de sa femme. Mais il est vrai qu’il n’y avait qu’un seul élève ! Les cérémonies continuent quand même, avec le discours d’ouverture de M. Sanh, et aussi ceux de réponse des autorités. M. Sanh donne tout de suite et publiquement, la bourse de toute une année pour ce premier et unique élève. La fête s’est déroulée sans aucun incident. Désormais, une école privée nommée TRUONG VINH KY a vu le jour, ce qui justifie la présence des Frères qui, aux yeux des gens, sont des enseignants dans cette école.

Les parents « voient » l’extérieur de ces enseignants sans savoir qui ils sont. Ils nous amènent pourtant leurs enfants pour des cours de rattrapage du niveau 1 à niveau 9 (la troisième du système français). Le nombre s’élève jusqu’à 70. L’effectif de la classe augmente un tout petit peu : 6 élèves, une augmentation de 600% !

Après une année de fonctionnement, l’école a gagné la confiance des parents. Frère Gustave a prévu une future classe du niveau 1 pour l’année 2005-2006 atteignant le nombre maximale : 30 élèves. Quelques familles qui habitent loin de l’école désirent cependant y envoyer leurs enfants. L’idée d’ouvrir un internat survient, ce qui veut dire l’augmentation obligatoire du personnel. Frère Joseph a bien réussi et a gagné la confiance des parents, même celle de certaines personnes du Parti qui ont envoyé leurs enfants à cette école privée.

8e essai : Centre  de formation professionnelle de PHU SON

PHU SON est un hameau du village de Bac Son, district de Trang Bom de la province de Dong Nai, situé à 40 kilomètre de Saigon. En 1971, le Frère Visiteur Bruno Tran Van Bang a acheté ce terrain de 8 hectares pour y planter des cannes à sucre. À l’arrivée des communistes en 1975, en voulant créer de petites communautés pour ne pas attirer l’attention des autorités, le Frère Lucien Quang y avait envoyé une dizaine de jeunes Frères. Ne s’habituant pas à la vie dure de la campagne d’une part, menant une vie qui semble bloquée, sans avenir d’autre part, l’un après l’autre a quitté l’Institut. Il ne reste que deux Frères un peu avancés en âge qui « persévérèrent » pour garder la terre, jusqu’à la fin des années 80. Quelques jeunes commençaient à venir avec les Frères et Phu Son devenait le pré-noviciat (Postulat) jusqu’en 2004. Le Frère André Thang, étant nommé directeur du Postulat, a présenté au Conseil des occasions favorables pour les études des postulants et la collaboration de plusieurs professeurs si le Postulat était transféré à Saigon. Ainsi approuvé par le Conseil, le Postulat est transféré à Saigon sans avoir voulu pourtant fermer cette communauté parce que la présence des Frères est plus ou moins implicitement reconnue par les autorités locales et que la nouvelle implantation d’une communauté n’est pas facile à réaliser. Deux autres Frères y sont envoyés pour maintenir la présence des Frères dans ce quartier.

Comme toujours, les enfants du quartier viennent chez les Frères pour des cours de rattrapage et pour l’initiation à l’informatique de base. D’ailleurs, en examinant la réalité, je remarque que cette terre est très pauvre et ne produit pas beaucoup par l’agriculture. Au début des années 70, tout était désert. Peu à peu, des gens venus des autres provinces, surtout du centre, s’y installent de plus en plus nombreux. Leur principal métier est l’élevage des porcs ou la menuiserie, ou être ouvrier journalier... Des enfants qui abandonnent l’école, des jeunes dépendant de la drogue... Des industries ayant vu le jour promettent l’avenir d’une zone industrielle importante... Une idée d’y créer un centre de formation professionnelle survient dans ma tête pour aider ces Frères à trouver un moyen de vivre à la fois authentiquement leur mission d’éducation et d’être financièrement autonomes. Je commence à sonder une personne médiatrice qui serait « capable » de ce projet. Voici la procédure de démarche : régulariser d’abord le terrain et ensuite l’ouverture d’un centre de formation professionnelle.

Il faut savoir que les Frères ont acheté ce terrain de 8 hectares en 1971, la ferme d’élevage de porcs d’à côté a envoyé ses hommes avec des fusils s’emparer deux fois de notre terre en 1978 et en 1994. Il nous reste actuellement 2 hectares 7. Le District a essayé d’intenter un procès depuis 1997 sans aucun succès. Les personnes de connaissance ont conseillé les Frères de régulariser la terre qui reste mais ils sont encore réticents en pensant que faisant cela, implicitement, nous acceptons la perte définitive de la terre emparée.

À un Conseil du District, j’ai présenté aux Frères conseillers le pour et le contre de cette régularisation surtout quand les autorités acceptent d’attribuer à l’Institut des Frères le « droit d’utilisation de cette terre »[8], ce qui implique officiellement la reconnaissance de notre présence. Par ailleurs, sans ce droit, il est presque impossible de faire quoi que ce soit officiellement parce qu’on exige toujours le « droit d’utilisation ».

J’ai commencé à déposer le dossier au mois d’octobre 2005. Après plusieurs « négociations », « pressions »... nous avons obtenu enfin cette note officielle envoyée par le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de Dong Nai :

« Comité du peuple de la province de Dong Nai

« Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société

« No 386/LĐTBXH-DN

« v/v Fondation d’un centre de formation professionnelle PHU SON

« A Bien Hoa le 30 mars 2006

« Au comité du peuple du district de Trang Bom

« au Bureau de l’Intérieur – des Travailleurs, des Invalides de guerre et de la Société de Trang Bom.

« En se basant sur la Circulaire No 01/2002/TT-BLĐTBXH parue le 4/01/2002 du Ministère du Travail, des Invalides de guerre et de la Société, sur l’initiation de la fondation, d’inscription pour le fonctionnement, de division ou de regroupement, de dissolution des centres de formation professionnelle et la Décision No 776/QĐ.BLĐTBXH signée le 09/08/2001 du Ministère du Travail, des Invalides de guerre et de la Société sur les statuts et le fonctionnement des Centres de formation professionnelle.

« Après avoir examiné le rapport de l’équipe de “jugement et de décision” sur le dossier d’inscription pour l’apprentissage de M. Nguyen van Tan le 22 mars 2006, le Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société de la province de Dong Nai émet son opinion :

« 1/ Le Centre de formation professionnelle possède toutes les conditions pour l’organisation d’apprentissage des métiers : informatique, menuiserie, couture industrielle, beaux-arts appliqués, de courte durée en dessous d’un an.

« 2/ Le Centre est fondé portant le nom :

« Centre de Formation Professionnelle Phu Son

« Adresse : No 81 – hameau Phu Son – village Bac Son – district Trang Bom – province de Dong Nai

« Téléphone : 061 869 753

« 3/ Le directeur du Centre de formation Professionnelle assume la responsabilité de formation permanente, de rehausser les compétences des enseignants, d’améliorer l’infrastructure et l’équipement, d’assurer les ressources financières pour favoriser un bon fonctionnement et un développement prometteur du Centre.

« Le Service propose que le Comité du peuple du district de Trang Bom examine et délivre la Décision de fondation du Centre de Formation Professionnelle de Phu Son. Le Service délivrera le certificat d’inscription de fonctionnement après avoir reçu la Décision de fondation du comité du peuple de Trang Bom selon les prescriptions du Ministère du Travail et de la Direction générale de la Formation professionnelle ».

Vice-président

Lam Duy Tin

Signature et cachet.

Tout joyeux, nous préparons le jour de l’inauguration. Suite à cette circulaire du Service du Travail, des Invalides de guerre et de la Société, nous avons reçu cette Décision du Comité du peuple du district de Trang Bom :

« Comité du peuple

« District de Trang Bom

« No 24914/QĐ-UBND

DÉCISION

V/v Fondation du Centre de formation professionnelle PHU SON

LE PRÉSIDENT DU COMITÉ DU PEULE DE TRANG BOM

-          « se basant sur la Loi d’organisation de la Conférence du Peuple et du Comité du peuple que l’Assemblée générale de la République du Vietnam Socialiste a approuvée le 26/11/2003 ;

-          « se basant sur l’arrêté No 02/CP publié le 09/01/2001 par le gouvernement prescrivant les détails et guides de la réalisation de certains articles du Ministère du Travail concernant la formation professionnelle et l’instruction No 01/TT-LĐ-TBXH publiée le 04/01/2002, guidant l’ouverture et l’administration des centres de formation professionnelle ;

-          « se basant sur la Décision No 1350/1999/QĐ.CT-UBT publiée le 15/4/1999 du président du Comité du peuple de la province de Dong Nai concernant l’organisation et l’administration des centres de formation professionnelle ;

-          « En examinant le résultat du “jugement et de la décision” suivant le dossier de demande de fonder le Centre de Formation professionnelle Phu Son de M. Nguyen Van Tan et la ciculaire No 386/LĐTBXH du 30/3/2006 du Service du Travail, des Invalides et de la Société de la province de Dong Nai concernant la proposition de la fondation du centre de formation professionnelle Phu Son ;

-          « Selon la proposition du chef du Bureau des affaires intérieures, du Travail, des Invalides de guerre et de la Société No 82/TTr-NVLĐTB&XH signée le 05/04/2006,

DÉCIDE :

« Article 1 : Accepte pour M. NGUYEN VAN TAN, né le 22 septembre 1945,

-          « domicilié à 146/42B Vo Thi Sau, District 3, Ho Chi Minh-Ville

-          « La fondation du Centre de formation professionnelle Phu Son.

-          « métiers à former : informatique, menuiserie, réparation des « vélomoteurs, couture industrielle, beaux-arts appliqués

-          « forme d’apprentissage : des classes à courte durée (03 mois, 6 mois, « 12 mois).

-          « Lieu de formation : No 81, hameau Phu Son, village Bac Son, district « Trang Bom, provine de Dong Nai.

« Article 2 : Le Centre de formation Professionnelle possède la « qualité de la personne juridique », un cachet et un compte particuliers. L’organisation et le fonctionnement du Centre sont conformes aux statuts du centre de formation professionnelle publiée et accompagnée la Décision No 776/2001/QĐ-LĐTBXH publiée le 09/08/2001 par le Ministère du Travail, des Invalides de guerre et de la Société.

« Article 3 : Les présidents des Bureaux de la Conférence du Peuple et du Comité du peuple du district, Chef du Bureau des affaires intérieures, du Travail, des Invalides de guerre et de la Société, de l’agence du taxe du district, président du comité du peuple du village de Bac Son, des directeurs des bureaux concernés et M. Nguyen Van Tan, se basant sur cette Décision pour agir, à la date de la signature.

« Président

« Nguyen Thi Thanh

« Signature et cachet

Cette Décision, signée le 11 avril 2006, est arrivée cependant chez les Frères une dizaine de jours après, vers le 20 avril 2006. Le 25 avril, j’ai reçu une autre Décision dont le contenu est le suivant, signée par la même personne :

« Comité du peuple

« District de Trang Bom

« No 2626/QĐ-UBND

Trang Bom le 25 avril 2006-11-02

DÉCISION

V/v suppression de la DÉCISION de fondation
du Centre de Formation Professionnelle PHU SON

LE PRESIDENT DU COMITÉ DU PEUPLE
DU DISTRICT DE TRANG BOM

-          « se basant sur la Loi d’organisation de la Conférence du Peuple et du Comité du peuple que l’Assemblée générale de la République du Vietnam Socialiste a approuvée le 26/11/2003, prescrivant la fonction, devoir et droit du président du comité du peuple de tous niveaux ;

-          « se basant sur l’arrêté No 02/CP publié le 09/01/2001 par le gouvernement et l’instruction No 01/TT-LĐ-TBXH publiée le 04/01/2002, du Ministère du Travail concernant la formation professionnelle ;

-          « Selon la proposition du chef du Bureau des affaires intérieures, du Travail, des Invalides de guerre et de la Société No 94/TTr-NVLĐTB&XH signée le 24/04/2006,

DÉCIDE

« Article 1 : retirer la Décision No 2494/QĐ-UBND le 11/04/2006 du Comité du peuple du district de Trang Bom, v/v fondation du centre de formation professionnelle Phu Son dont M. Nguyen van Tan est le représentant.

« Raison : Le dossier de demande n’est pas encore exact selon le processus des prescriptions.

« Article 2 : confier la responsabilité au Bureau des affaires intérieurs – du Travail, des Invalides de guerre et de la Société du district à retirer la Décision et à en rendre compte au comité du peuple du district avant le 27 avril 2006.

« Article 3 : Les présidents des Bureaux de la Conférence du Peuple et du Comité du peuple du district, Chef du Bureau des affaires intérieures, du Travail, des Invalides de guerre et de la Société, de l’agence du taxe du district, président du comité du peuple du village de Bac Son, des directeurs des bureaux concernés et M. Nguyen Van Tan, se basant sur cette Décision pour agir, à la date de la signature

« Président,

« Nguyen Thi Thanh

« Signature et cachet

En observant la Décision et cette suppression, nous remarquons qu’elles sont signées par le même président du comité du peuple du district de Trang Bom et basées sur les mêmes prescriptions en un espace de deux semaines. Pourquoi cette suppression ? Il me faut donc chercher à comprendre la raison. M. Thuc, du bureau du Travail, des Invalides de guerre et de la Société du district de Trang Bom, celui qui est venu au centre de formation professionnelle Phu Son, avec un agent du même Service de la province pour voir la réalité avant de décider, m’a dit d’aller « voir le chef du bureau des affaires religieuses du district de Trang Bom ». Je comprends un peu la raison de cette suppression. J’ai trouvé un jeune homme qui le « connaît » et lui ai dit de le contacter pour demander un rendez-vous. Après un moment de « négociation et de supplication », il l’a accepté, pour le mardi de la semaine suivante. À l’heure du rendez-vous, je me suis présenté à son bureau. Pendant toute la conversation il tourne autour de cette opinion : « il y a deux bureaux importants où vous n’avez pas déclaré : comité du peuple du village de Bac Son et bureau des affaires religieuses (son bureau). Parce que c’est un établissement religieux, le président du comité du peuple du district n’a pas le droit de délivrer la “Décision” » ». Il faut une litanie de demande de pardon et de promesse de ne plus recommencer et aussi de supplication de son aide. En fin de compte, il a promis de m’aider en envoyant un message favorable aux autorités compétentes de la province dont ci-dessous est l’extrait :

« [...]. L’Institut lasallien, situé au hameau Phu Son, village Bac Son, est un établissement appartenant à la Congrégation au Vietnam Il est inscrit légalement et a mené des activités religieuses conformes aux prescriptions du gouvernement. Depuis longtemps, la Congrégation a donné une formation professionnelle aux jeunes dans le village et à ceux qui sont en difficulté, mais pas très développée. Devant les besoins d’embauche des compagnies et des entreprises dans le quartier, la Congrégation a déposé un dossier de demande afin d’ouvrir un centre de formation professionnelle pour pourvoir aux jeunes un métier et aider les gens en difficulté. Après avoir examiné le dossier, le bureau des affaires religieuses du district juge que la demande de fondation d’un centre de formation professionnelle de la Congrégation lasallienne à Phu Son s’accorde bien avec la réalité et l’ordonnance concernant la Religion et l’arrêté No 22/2005/NĐ-CP »

« Bureau des affaires religieuses

« Vuong Dinh Cho

« Signature et cachet

Depuis ce jour-là M. Cho est devenu très « familier » avec la communauté de Phu Son. À l’invitation du Frère Vincent Long, il est venu même jusqu’à Saigon (60 km) pour assister au concert à la fête de Saint Jean-Baptiste de La Salle le 14 mai 2006. En réalité, grâce à lui, nous avons pu construire un mur de 150 mètres de longueur et un atelier de 400 m2 sans la « visite » de la police tandis qu’avant cet incident, recouvrir seulement un toit est « inspecté » par la police du village.

Je persiste à continuer mon chemin dans la province. Cinq mois ont passés, au moment où j’écris ces lignes …une petite lueur scintille au bout du tunnel. J’attends.

9e essai : communauté de Binh Cang

Frère Valentin Qui, responsable des affaires concernant les propriétés du District est allé à Nha Trang pour sa mission de ce genre en cette année 2001. Il est venu voir M. Tuân, neveu du vice évêque Nho du diocèse de Nha Trang. Celui-ci l’a mis au courant de l’achat d’un terrain de 3 000 à 4 000 mètres carrés de la part du vice évêque qui était à l’étranger à ce moment-là.

Un jour dans la soirée, Frère Valentin Qui a reçu un coup de téléphone de Nha Trang lui annonçant le retour de cet évêque qui s’était reposé à l’hôtel du diocèse de Saigon : « Viens voir tout de suite l’évêque. Il partira pour Nha Trang tôt le lendemain. J’ai entendu qu’une Congrégation féminine vise ce terrain. Hâtez-vous sinon ce sera trop tard ». Frère Valentin a téléphoné à l’évêque et voilà une demi-heure après, l’entretien est entamé.

« - Quelque chose de pressant pour me voir tout de suite ? demanda l’évêque ».

« - Monseigneur, répondit Frère Valentin, j’ai entendu dire que vous aviez acheté un terrain à Binh Cang et que vous y désiriez la présence des religieux comme un berceau pour annoncer le Royaume de Dieu. Les Frères veulent bien s’y installer pour prévenir le cas où notre communauté à Vinh Tho serait dissoute. »

« - Je suis très content de la présence des Frères à Binh Cang. Va contacter M.Tuân, mon neveu, pour toutes les formalités de propriété. »

Frère Valentin est retourné à Nha Trang pour voir M. Tuân qui l’a amené voir le propriétaire de ce terrain, M. Xuân, ancien élève de l’école des Frères à Nha Trang, école Ba Ninh (Saint Bénilde). Il n’y a eu aucun problème pour le transfert du propriétaire. Mais pour éviter des problèmes plus tard à cause des religieux, le Conseil a décidé de dire à M. Tuân de signer de son nom sur le « droit d’utilisation » de ce terrain. Plus tard M. Tuân signera un autre papier certifiant que ce terrain appartient à l’Institut des Frères avec la signature du vice évêque, à côté. L’évêque a payé ce terrain pour les Frères. Les papiers sont remplis, mais les Frères se sont figés sur place en attendant l’aide financière. Sachant leur « situation démunie », le vice évêque a avancé l’argent pour la construction. Ce ne seront pas les Frères qui le rembourseront mais une association de sa connaissance à l’étranger. En fin de compte, les Frères ont bénéficié de cette maison et de cette terre par la totale bienfaisance du vice évêque.

La maison est construite, la présence des Frères est donc « obligatoire » par délicatesse. Le Frère Visiteur François y a envoyé donc deux premiers Frères jeunes au mois de septembre 2001 : Frère Joseph Quân et Frère Khuat Dang Hung qui est décédé une année après à l’âge de 37 ans.

 L’existence de la communauté de Binh Cang jusqu’à ce jour doit tout à M. Tuân. Il a assumé toutes les responsabilité devant les autorités locales comme si cela lui appartenait : demande de l’autorisation de la construction, du « droit de la propriété »... Pour pouvoir habiter là, les Frères devaient s’inscrire temporairement dans son livret de famille en tant que personnes de liaison. Le caractère de religieux n’est jamais déclaré jusqu’au jour où les autorités reconnaissent que la présence de ces personnes ne « nuit pas à la société ». Comme travail à la maison, les Frères ont donné des cours de rattrapage en petits groupes et aidé le curé pour certaines activités dans les locaux de l’église.

Cette année 2006, le Service des affaires religieuses à Nha Trang a demandé à toutes les Congrégations de faire un papier de déclaration avec beaucoup de détails concernant leur Institut : leur supérieur, nombre de communauté, activités... et surtout a demandé un exemplaire de la Règle. Les Frères sont bien hésitants et ont pris la décision assez hasardeuse de tout déclarer, soit qu’ils seront acceptés, soit qu’ils diront adieu à Binh Cang.

10e essai : communauté de Dak-mil

Pendant plusieurs années consécutives, Monseigneur Truc, vice évêque du diocèse de Buôn Mê Thuôt et ancien élève des Frères, a insisté auprès de Frère François pour l’installation d’une communauté à Dak-mil, district de Buôn mê Thuôt, situé à 60 kilomètres de cette province vers le sud. Il a présenté Frère François au curé de la paroisse de Vinh An[9], le Père Cuong, un ancien de Taberd. Tous les deux favoriseraient l’arrivée des Frères.

Frère Valentin Qui, accompagné du Frère Césaire Vu Duy Nang est venu à Dak-mil pour une approche du terrain. Tous les deux se sont rendus auprès de M. Chinh, président du Conseil de la paroisse de Vinh An, qui a envoyé un de ses fils chez les Frères. Il a proposé d’abord aux Frères une petite colline située à 500 mètres de l’église paroissiale et ensuite un autre terrain un peu étroit dans la plaine. Mais les Sœurs de Notre-Dame de la Paix l’ont choisi en vue d’ouvrir des classes maternelles pour les enfants des minorités ethniques. Les Frères n’ont eu d’autre choix que la petite colline cédée par la paroisse le 28 mai 1998. Un seul inconvénient, c’est la question de l’eau potable : pas de puits, pas d’accès de l’eau courante.

Bien que la maison ne soit pas encore construite, mais selon les dispositions du curé, le District a décidé de s’y installer au début de l’année scolaire 1998-1999. Voici les trois Frères pionniers : Gustave Diep Tuan Duc, Khuat Dang Hung et Pierre Nguyen van Phat habitant temporairement chez M. Chinh qui les a déclarés comme « ses parents » aux autorités. Peu de temps après, Frère Gustave est tombé malade et le Frère Colomban Lê van Dao est venu le remplacer. Pendant ce temps, comme M. Tuân à Nha Trang, M. Chinh signe de son nom le « droit de l’utilisation de ce terrain » et assume la responsabilité de construire la maison des Frères. Ainsi tout le monde a cru fermement que la maison sur la colline appartenait à M. Chinh.

Quand la maison fut achevée, les Frères quittèrent la maison de M. Chinh et s’installèrent à la nouvelle « villa » le 20 décembre 1998, c’est-à-dire qu’à partir de ce moment-là les Frères se montrèrent sans dissimulation. Très zélé, Frère Colomban a rendu visite à tout le monde, à des familles pauvres et surtout, à la famille d’un homme qu’il a connu en prison ! Mais la vie n’est pas facile, comme l’on pense. Ayant découvert la présence des religieux, les policiers ont convoqué chaque Frère à tour de rôle et les ont obligés à faire plusieurs fois l’autocritique et leur curriculum vitae. Le Frère Colomban a déclaré devant la police qu’il y était envoyé pour « fonder l’Institut ». Il raisonnait : « nous disons ce que nous sommes, rien à craindre ». Le résultat ? La police de la province a donné l’ordre à ces Frères de « quitter tout de suite Dak-mil ». Alors, cette nuit même, ils ont tout quitté chacun de son côté, sans avoir pu apporter beaucoup avec eux. C’était en 1999.

La maison fut ainsi abandonnée, les vitres cassées et les portes déformées. Elle devient un lieu de rendez-vous des jeunes couples. Certains Frères proposèrent de la revendre mais la terre appartient en principe à la paroisse. Les Frères n’ont pas le droit de la revendre. En 2004, j’ai envoyé Frère Césaire Vu Duy Nang y revenir à titre d’essai. Pendant quelques premières semaines, aucun problème n’est arrivé, il commençait à attirer les jeunes pour des cours de rattrapage, environ 60 élèves de sixième à la terminale et 4 minorités ethniques comme internes. Après 6 mois de fonctionnement, la police l’a « visité » et lui a ordonné de quitter Dak-mil dans deux semaines. Il fallait donc chercher quelqu’un qui serait capable de « négociation ». Il en a trouvé enfin un et grâce à celui-ci, la police a donné verbalement cet ordre : « Dis-lui de rester là ». Et il reste là depuis 5 mois sans problème. À sa demande, j’y ai envoyé encore un autre Frère pour l’accompagner. Les parents ont commencé à confier leurs enfants. Une vingtaine de garçons s’est inscrite à l’ « internat » et une trentaine d’autres pour des cours de rattrapage. Pour créer un bon lien social, j’ai envoyé une équipe de médecins et infirmiers pour consultation et distribution de médicaments pour environ 1 500 minorités ethniques au mois de février 2007. À l’occasion du jour de l’an lunaire, Frère Césaire a fait cuire des gâteaux de riz pour faire cadeaux à plus de 100 familles, avec des vêtements, aliments et jouets pour fêter le Têt. Jusqu’à présent, la vie est devenue de plus en plus « facile à respirer ». Au 15 mai 2007, Frère Césaire a organisé la fête de Saint Jean-Baptiste de La Salle à l’église paroissiale, une occasion pour parler aux fidèles de notre présence à Dak-mil.

11e essai :   Institut de théologie et de pédagogie

Comme analysé dans la première partie, il y a eu une longue interruption des nouvelles vocations. Au début des années 90, les jeunes recommencèrent à rejoindre la vie des Frères. Peu nombreux, ils suivaient des cours de théologie en formation organisée chez les dominicains pour de futurs prêtres avec quelques autres congrégations. Le Frère Lucien fut nommé directeur du Scolasticat à la place du Frère Michel Hong qui a quitté le Vietnam en 1998 et s’est fait prêtre en 2005, ce dont j’ai parlé plus haut. Étant à la fois ancien Visiteur Provincial dans les années les plus difficiles du pays et théologien compétent, il trouvait que l’itinéraire de formation des prêtres n’était pas adapté à nos jeunes Frères. Il a pris ainsi l’initiative d’organiser des cours de formation au Scolasticat même. Certains religieux et religieuses d’autres Congrégations suivirent aussi ces cours.

Au 10e Chapitre du District en 2003, les Frères Capitulants ont visé ce but de transformer ces classes de théologie et de pédagogie catéchétique en un Institut officiellement reconnu par le Cardinal. Tout le monde n’a pas été d’accord par prudence ou par complexe d’infériorité, on ne sait pas exactement. La majorité a gagné cependant avec ces Orientations et Propositions :

II/ ORIENTATIONS

1.      La catéchèse étant un caractère spécifiquement lasallien, le Chapitre de District invite les Frères et Associés lasalliens à s’y engager et à la rénover.

2.      Il est souhaité d’organiser un programme d’études théologiques et catéchétiques avec une orientation claire et spécialisée : trois ans d’études théologiques, et deux ans d’études supérieures de catéchèse.

III/. RECOMMANDATIONS

Recommandation 7

·         Le temps est venu de donner forme à un système de formation de catéchistes : programme de deux ans, avec corps professoral, systèmes de programme et de certificats.

Recommandation 8

·         De la même façon, sera mis en activité un système de trois ans de théologie pour laïc et religieux.

IV/  PROPOSITIONS

Proposition 7.

·         Le programme des Cours Supérieurs de Catéchèse de deux ans et de théologie de trois ans débutera en 2003-2004. Les étudiants se composeront de laïcs, des membres de la Famille lasallienne, de religieux et religieuses.

Grâce à aux compétences du Frère Siméon Pham Quang Tung accompagné du Frère Vital Nguyen Huu Quang avec la collaboration de nombreux prêtres, religieux et religieuses ainsi que de personnes laïques formant ce corps professoral, ces classes attirent de plus en plus nombreux des participants religieux et laïques dont le nombre s’élève à 200 environ. En 2005, cet Institut a été officiellement reconnu par les autorités religieuses et civiles comme un « satellite » de l’Institut de Théologie du diocèse de Saigon : Institut Nguyen Van Binh[10].

12e essai : des activités « saisonnières »

Parallèlement à ces « activités permanentes », il faut faire sincèrement l’éloge des Frères qui se sont consacrés à des « activités saisonnières » multiples et variées avec beaucoup d’esprit créatif, de ténacité et de courage en dépit des incidents causés par la police. Un principe est posé par les communistes : toutes activités qui ont rapport avec la religion doivent se dérouler dans les locaux de l’église et des réunions au-dessus de 5 personnes exigent l’autorisation des autorités locales. Ce principe est difficile à respecter et nous invite par conséquence au mensonge. Par ailleurs, l’esprit créatif ne bloque pas les Frères seulement « dans les locaux de l’église », mais les encourage à « associer volontiers des laïcs à leur mission éducative »[11] dans de multiples domaines.

Voici quelques « activités saisonnières » parmi d’autres :

-          cours de religion : beaucoup de jeunes s’offrent généreusement à l’enseignement du catéchisme dans les paroisses surtout des provinces. Mais il leur manque la formation doctrinale et pédagogique adéquate. C’est pour répondre à ces besoins que chaque année, pendant les grandes vacances par exemple, un groupe de Frères accompagnant des jeunes se rend à Ca-mau (sud-Vietnam), à Tram Chim, à Hue (au centre) pour donner des cours de pédagogie aux Sœurs et aux catéchistes et aussi des cours de rattrapage aux enfants.

-          Consultation et distribution des médicaments aux pauvres : en moyenne une fois par mois, des docteurs et infirmiers bénévoles viennent dans les campagnes pour consultation et distribution gratuites de médicaments aux pauvres.

-          Sorties pour des enfants de la rue de nos classes d’affection aux grandes fêtes de l’année : Mi-automne, Noël, Têt (nouvel an lunaire), fête internationale des enfants (1er juin).

-          Visites de temps à autres aux hospices des vieillards, aux personnes isolées dans les hôpitaux, aux léproseries, aux orphelins, aux patients du SIDA à la dernière étape.

-          Accompagnateur des jeunes étudiants catholiques (JEC)......

Conclusion

Le district du Vietnam se réunit une fois tous les 4 ans. L’année prochaine au mois de février, le 11e Chapitre du District se réunira pour la 1ère session et les Capitulants éliront le nouveau Visiteur Provincial. C’est le moment de relire un peu les Propositions du Chapitre précédent sur la mission des Frères dans le contexte social du Vietnam :

LA MISSION

A/ SERVICE EDUCATIF des PAUVRES

I. CONSTATS

[…]

1.         Depuis quatre ans, le souci du service éducatif des pauvres devient de plus en plus évident à travers un certain nombre de réalisations concrètes du District.

2.         Cependant ce service exige toujours une continuelle conversion du cœur et de la façon de vivre de chaque Frère du District.

3.         Le choix prioritaire en faveur des pauvres concerne aussi les Associés lasalliens capables de coopérer avec les Frères.

II/ ORIENTATIONS

[…]

1.         Que le District centralise ses efforts sur certaines œuvres de pointe : centres de formation professionnelle et culturelle pour les zones retirées et les zones de montagnes, pour les drogués après guérison, classes de charité.

2.         Il est nécessaire de promouvoir la créativité pour trouver les moyens, les instruments pédagogiques... pour fournir des occasions aux jeunes, aux pauvres d’accéder effectivement aux œuvres mentionnées (Cf. 9e Chap. de District, p. 16).

3.         Le District et les Associés lasalliens acceptent de se diriger pas à pas vers les milieux sociaux où ils pourront entrer en contact avec les jeunes défavorisés.

III/  RECOMMANDATIONS

Recommandation 5

·         Pour stimuler la conversion selon l’esprit de pauvreté évangélique, le District établira des structures concrètes pour aider

o        les sujets en formation à entrer en contact avec les enfants pauvres,

o        les jeunes Frères en Communauté à avoir l’occasion de vivre un certain temps dans les zones retirées, éloignées, avant leur Profession de Vœux Perpétuels.

Recommandation 6 

·         Fournir des occasions aux Associés lasalliens de collaborer aux œuvres ci-dessus mentionnées, au service des pauvres.

IV/  PROPOSITIONS

Proposition 5.

·         En vue du développement du service éducatif des pauvres,

[…]

a.      que le District évalue chaque année ce service dans les Communautés et dans les Centres créés à cette fin selon l’esprit lasallien, et informe chaque Communauté des résultats de cette évaluation ;

b.      que le District aide concrètement ces Centres et intervienne à temps pour leur permettre de se consolider et se développer ;

c.        que le District encourage les Associés lasalliens et leur donne occasion de renforcer leur collaboration.

Proposition 6.

·         Que chaque Communauté témoigne de sa solidarité avec les Communautés ayant des œuvres au service des pauvres, et les aide de façon concrète.

B. CATECHESE

I/ CONSTATS

1. L’annonce explicite de la Bonne Nouvelle au Vietnam continue à faire face à deux défis :

·                  Le Vietnam est un pays à multiples religions (Cf. Circ. 447, p.30 Constats 1)

·                  Le contexte éducatif reste toujours défavorable à la religion (Cf. 9e Chapitre de District, p. 19).

2.      Cette annonce explicite a été réalisée par des Frères et des Associés lasalliens dans les maisons religieuses, les paroisses et le Scolasticat de façon systématique, et a été évaluée chaque année depuis le 9e Chapitre de District (Cf. Circ. 447, p. 30 Constats 3)

3.      À cause du besoin d’améliorer la qualité de la communication du contenu doctrinal dans les classes actuelles, il est nécessaire d’organiser des sessions de formation de catéchistes systématisées et spécialisées.

4.      Il est nécessaire d’ouvrir les cours du Scolasticat lasallien aux laïcs, aux membres de la Famille lasallienne et aux religieux d’autres Congrégations.

II/ ORIENTATIONS

[…]

3.      La catéchèse étant un caractère spécifiquement lasallien, le Chapitre de District invite les Frères et Associés lasalliens à s’y engager et à la rénover.

4.      Il est souhaité d’organiser un programme d’études théologiques et catéchétiques avec une orientation claire et spécialisée : trois ans d’études théologiques, et deux ans d’études supérieures de catéchèse.

III/. RECOMMANDATIONS

Recommandation 7

·            Le temps est venu de donner forme à un système de formation de catéchistes : programme de deux ans, avec corps professoral, systèmes de programme et de certificats.

Recommandation 8

·            De la même façon, sera mis en activité un système de trois ans de théologie pour laïc et religieux.

IV/  PROPOSITIONS

Proposition 7.

·            Le programme de Cours Supérieurs de Catéchèse de deux ans et de théologie de trois ans débutera en 2003-2004. Les étudiants se composeront de laïcs, des membres de la Famille lasallienne, de religieux et religieuses.

Proposition 8.

·            Le District et les Communautés continueront et développeront la collaboration avec l’Eglise locale dans la formation des catéchistes.

C. LES PENSIONNAIRES

I/ CONSTATS

1.      Les Frères du District prennent davantage conscience de l’importance de l’éducation chrétienne et humaine dans les maisons lasalliennes pour pensionnaires.

2.      Les parents ont besoin d’un milieu sain et crédible où ils puissent confier leurs enfants.

3.      Dans les maisons pour pensionnaires, les Frères ont la possibilité de découvrir et de cultiver des vocations.

II/ ORIENTATIONS

1. Dès les maisons de formation, il est nécessaire d’aider les jeunes Frères à prendre conscience que l’éducation des pensionnaires est aussi un moyen d’éducation humaine et chrétienne de l’Institut.

2. Il est conseillé au District d’organiser des sessions périodiques de formation au sujet des pensionnaires.

III/  RECOMMANDATIONS

Recommandation 9

·         Le District composera un Guide pour les maisons de pensionnaires ; une évaluation sera faite sur le plan du District après deux ans de mise en application ; les résultats seront communiqués à toutes les Communautés.

Recommandation 10

·         accepter la collaboration des Associés au sujet des pensionnaires.

IV/ PROPOSITIONS

Proposition 9

·         À chaque vacance d’été, le District organisera une session destinée aux Frères, au sujet des pensionnaires.

Proposition 10

·         Le District donnera l’occasion aux Frères Scolastiques de faire des stages annuels dans les maisons de pensionnaires.

En lisant ces lignes des Propositions du 10e Chapitre du District du Vietnam, nous voyons clairement l’option décisive de sa mission : service éducatif des pauvres. De multiples « essais » ci-dessus manifestent un grand effort de la part des Frères pour retrouver sans cesse leur place dans cette société complexe et pleine de difficultés, ce qui exige beaucoup de ténacité et de créativité pour survivre. Difficile, parce que nous ne pouvons pas faire ce que nous voulons. « Endurci », parce que sans le « mensonge » nous mourrons. Ce n’est pas seulement le cas de notre Congrégation mais aussi celui de centaines de prêtres ordonnés sans l’« autorisation » du gouvernement. Un Père Provincial des Rédemptoristes a affirmé publiquement lors d’une assemblée des Supérieurs majeurs des congrégations: « On nous oblige à mentir, ce qui peut se rendre utile ». Habituellement, il faut faire un détour pour obtenir ce que nous voulons même pour des activités caritatives ! À un repas au restaurant, j’ai demandé à une personne du Parti, responsable des affaires religieuses du district de Trang Bom, de la province de Dong Nai : « Est-ce que nous pouvons ouvrir des écoles ? ». Il m’a répondu « non ». Mais, « vous pouvez chercher un civil qui signe de son nom la demande ». Il m’a indiqué ainsi un interstice pour m’insérer dans le monde de l’éducation.

Cette longue présentation des essais peut paraître fastidieuses mais elle est nécessaire pour saisir le travail permanent faite par la congrégation pour trouver sa place dans un pays socialiste ce qui demande infiniment plus de créativité dans un autre contexte.

 

[1] John JOHNSTON, Lettre Pastorale, 1994, page 17.

[2] John JOHNSTON, Lettre Pastorale, 1994, page 17

[3] Texte intégral, Annexes, page 67, ligne 1954.

[4] Annexes 1, page 10, ligne 287.

[5] Annexes, page 146, ligne 1419….

[6] Frère ALBAN, F.S.C., Histoire de l’Institut des Frères des Écoles Chrétiennes, Éditions Générales F.S.C., page 189.

[7] Frère ALBAN, F.S.C., Histoire de l’Institut des Frères des Écoles Chrétiennes, Éditions Générales F.S.C., page 514-515.

[8] Selon les lois actuelles du Vietnam, personne n’est propriétaire de sa terre. La terre appartient au gouvernement, le peuple a seulement le “droit d’utilisation” délivré par les autorités.

[9] Vinh An est le nom de la paroisse tandis que Dak-mil est celui du district de Buôn mê Thuôt où se situe Vinh An.

[10] Nguyen Van Binh, nom de l’Archevêque de Ho Chi Minh-Ville décédé en 1997.

[11] Règle des Frères, art. 17